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124 la vie, c'est la douleur ! Malheur à celui qui ne pleure pas ! Barrotprit l'attitude de prophète : — Notre femme, s'écria- t-il, viendra tarir la source des pleurs ; sa, parole sera plus douce que le chant de l'alouette, sa voix plus puissante que le cri de l'aigle ; les hommes par elle se sentiront reliés à une autre vie. Plus de guerres! plus de crimes! Plus de crimes! mais tu voudrais un monde peuplé de mar- chands de fil! lui cria avec fureur Borromée. Plus de théâtre donc, plus de romans, plus de scènes de Grève, plus de ce» émotions qui vous tenaillenl et vous prennent à la gorge! Barrotle regarda avec pitié : Comme si l'ordre n'était pas préférable au désordre, la santé à la fièvre, le repos à la fatigue ! La société actuelle ressemble aux ruines des siècles passés ; les hommes, débris informes , se débattent dans le malheur et l'impuissance. La mère viendra, qui de ces dé- bris reconstruira le temple de Dieu, plus vaste , plus beau, plus saint. Borromée était devenu immobile. — Et lu dis que vous cherchez une femme qui accomplira ces choses-là ! L'intuition de l'avenir m'a saisi, reprit Barrot; la provi- dence m'a révélé que cette année serait l'année de la mère. Pourquoi cela ne serait-il pas ? murmura Borromée. Moi awssi je cherche une femme, mère ou fille , peu importe ; puis me voilà sur le pavé ! Oui, dit-il à Barrot, tu viens d'il- luminer ma foi ; je veux être des vôtres. Le soir, dans l'intervalle d'un couplet et d'une valse, il échangea ses habits contre la tunique bleue et le berret rouge. Et maintenant où Irouvera-t-il la femme-messie? à quels signes la reconnaître ? Il poursuit des yeux toutes les femmes qu'il rencontre. La mère sera belle, lui a dit Barrot; Bor- romée voit la mère dans toutes les femmes belles. Un dimanche , Borromée se promenait sous les Tilleuls; ses besoins d'amour s'exaltaient au milieu d'un essaim de fem- mes. Soudain il s'arrêta devant une jeune dame pétillante de