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nez, les jésuites , après l'orage passé, rasseurerent leur con-
tenance , et le lendemain acheuerent tellement quellement
leur drollerie , puis enleuerent tout l'équipage, et beaucoup
de bagage des ioueurs leur est resté pour s'en accommoder à
la manière des bons mesnagers qui font leur profit de tout.
    I'adiouterai venant de quelqu'un digne de foy, pour dé-
 claration de ce que j'ay touché en vn mot. Le deuziesme iour
 (dit-il),comme l'on eust mis le feu au premier pétard, voilà
 l'air paravant bien clair qui se va couvrir d'une nuée si es-
 paisse, et vne pluye si impétueuse survient, qu'on ne pou-
 uoit aller par les rues de Lyon. Outre plus les esclairs es-
 tbyent si frequens et les tonnerres si effroyables, que plusieurs
 pensoyent que ce fust la fin du monde. Etie croy fermement
 (dit encore ce personnage) que Dieu courroucé de telle im-
 pieté manifestoit sa puissance. Entre trois tonnerres qu'il fit,
 il y en eut vn si terrible que la fouldre cheut sur vne tour qui
 est au bord du Rhosne, ioignant le collège des iesuites : leans
 y auoit vn homme qui fut blessé, et vne femme tuée. La
 fouldre rompit la cheminée par où elle entra , puis sortie par
 le mesme endroit se jette sur vn basteau chargé de bois,
 qu'elle fait couler au fond du Rhosne. Ce sont ses mots.
     te Les iesuites composans leur contenance contre ces coups
 du ciel, acheuerent le lendemain , comme i'ay dit, et s'estu-
dient à maintenir leur réputation. Quant à leurs disciples et
sectateurs, ils reputent à miracle que les iesuites et comédiens
n'aient esté foudroyez et abimez, et disent que c'est vne mar-
que visible de la perfection de ceste nouuelle secte. Ainsi quoy
qui auienne, ils ne peuuent errer. Se moquer de Dieu deuant
les yeux de toute vne ville, exposer en risée la Saincte Yerité,
faire que les prochains et athées se iouent audacieusement de
tout ce qu'on proposera de vie et de mort éternelle, ren-
uoyant le tout aux théâtres des iesuites : ce sera , si l'on en
croit ces droïles, vn passe-temps , vn vain espouuantail, vn
ieu de trois iours, vn spectacle remplissant les esprits mal
asseurez de vaines et détestables imaginations.