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298                   CHASSE A T;A GRIVE.

    Puis d'un village enfoncé dans un vallon, partait un cri
de guorre et de vigilance ; c'était le coq qui annonçait
le prochain réveil du jour, et son signal, retentissant
 au milieu des ténèbres, venait expirer au fond des échos
qui nous entouraient.
   Puis parfois, là-haut, dans les régions élevées, on en-
tendait le glapissement aigu du renard; c'était un chagrin
pour les chasseurs, car ce petit aboiement maigre et plain-
tif annonçait qu'un lèvreau de l'année, gras et dodu, avait
à ses trousses un ennemi rusé et infatigable, que ne dé-
concerteraient ni la course la plus rapide, ni les crochets les
plus variés, ni les ruses à l'usage de la gent léporine, et,
pour comble de malheur, qu'un camarade renard, un com-
plice, quelquefois la femelle, souvent un vieux routier ma-
tois ou un renardeau à ses premières armes, tapis au pas-
sage, attendait le gibier et l'étranglerait infailliblement,
sauf aux deux assassins à se partager la curée.
   Les dernières heures de la nuit s'écoulaient ainsi. Puis
les étoiles pâlissaient; la nuit devenait d'un bleu doux et
tendre, l'air fraîchissait ; sous ce souffle imperceptible du
matin, les habits devenaient plus légers. Alors, l'attention
redoublait; lâchasse allait commencer.
   Le premier être qui s'agitait dans le silence des bois
était le faux-bourdon. Son grondement ailé, le bruisse-
ment rapide et continu de ses ailes, ce bourdonnement so-
nore qui lui a fait donner son nom était le premier signal
du réveil de la forêt. Le faux-bourdon, désireux de déjeu-
ner, quittait son arbre et volait sans route bien fixe et bien
arrêtée; arrivé devant les mailles du filet, il trouvait un
obstacle inconnu, insolite qui l'inquiétait et piquait sa
curiosité ; il passait et repassait à travers les fils invisi-
bles, en haut et en bas, à droite, à gauche, étudiait ce
mystère qui dépassait les bornes de son intelligence, puis
donnant sa langue au chat, s'éloignait sans avoir compris
ce que pouvaient être ces fils tendus sur son passage et
dont ses amis ne lui avaient jamais parlé.