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                  LES CHASSl-UHS XiV, l-.l-.SKES.        2tJ

 doute, était accroupie devant le cadavre et lui peignait
 la figure en rouge. De temps en temps, elle s'arrêtait et
 contemplant son oeuvre funèbre, elle poussait, en levant
 les bras, ce cri sauvage de détresse et d'horreur qui était
 venu jusqu'à moi. Auprès d'elle, un enfant se roulait à
 terre en pleurant ; et dans nn coin obscur, on apercevait
 la silhouette d'un vieillard, morne, silencieux, affaissé,
 la tête dans ses mains. Jo n'oublierai jamais cette scène
 de désolation.
    A Solutré, quand un chef de famille mourait, on reten-
 dait ainsi sur le foyer domestique avec ses armes et ses
 provisions pour le grand voyage. Puis, après un repas
 où tous les amis du défunt étaient conviés, on renversait
 la hutte sur le cadavre en faisant écrouler les parois et
 le toit qui la couvrait, en sorte que la demeure du chas-
 seur de rennes devenait son tombeau après sa mort. Les
 enfants et les femmes étaient enterrés à peu près de ia
 même manière dans des fosses et sur des foyers formés
à cette occasion et.simulant la hutte domestique. Cepen-
dant, en hiver, quand le sol était gelé et faisait une
masse solide, inattaquable avec de mauvais outils en
bois ou en os, les seuls qu'on possédât, on inhumait les
morts avec le même cérémonial dans une cavité creusée
dans la cabane même , au-dessous du foyer. Le corps
était recouvert des débris retirés de la fosse, le foyer
rétabli sur la sépulture, et l'on continuait à vivre au
même lieu. Presque toutes les huttes de Solutré avaient
ainsi leurs hôtes funèbres.
  TTne triste surprise m'attendait quand je fus pour
rentrer sous mon toit. Ma cabane, comme je l'ai dit pré-
cédemment, était, ainsi que toutes les autres, creusée en
partie dans le sol. Pendant mon absence, les eaux l'avaient
envahie et submergée à pleins bords. Il me fallut orga-