page suivante »
20f> CHASSE A LA GRIVE. tombait, quand le vent sifflait et que la famille assemblée travaillait autour du feu, on a raccommodé et mis en état toutes les mailles de la pantière. Voilà l'automne, les rai- sins sont mûrs, les grives arrivent: c'est le moment de s'établir. On choisit à bord de bois, dans un sentier, une clairière, non loin des vignes, un endroit propice, ni trop vide ni trop ombragé. On plante, à cent pieds de distance, deux hautes et fortes bigues ou perches dont le haut est four- chu ; parfois, on se sert d'une forte branche dépouillée faisant crochet à un arbre élevé; l'essentiel est que le support soit solide et que la corde glisse rapidement dans la fourchette qui sert à hisser le filet. Une perche longue, légère et fourchue sert à élever le cordeau et à le passer à la fourchette immobile. On tire sur la corde, et le filet monte lentement jusqu'à la hauteur de la bigue ou de l'arbre qui sert de premier support. On attache, par un nœud simple et facile à défaire, la corde à hauteur d'appui et l'on court à la seconde bigue faire la même opération. Le filet est tendu ; une haute muraille verte dont ie tissu se confond avec le feuillage, sépare la partie du bois où l'oiseau a dormi de la vigne où il va prendre son repas ma- tinal. On jette sur le sol un dernier coup d'œil; on coupe les branches qui pourraient gêner ou déchirer le filet, on apla- nit les herbes de la clairière, on nettoie, on est inquiet, on revient. La forêt tout entière murmure, les chasseurs oc- cupent tous les passages ; il y a là , de distance en dis- tance, toute la jeunesse du village ; l'un emprunte une serpette, l'autre a égaré sa perche, un autre a cassé sa cheville ; puis chacun se range debout et attentif au pied de sa bigue ; un immense silence se fait, on croirait être dans une forêt vierge, dans un monde vide et désert ; on attend.