page suivante »
LES CHASSEURS DE RENNES. 169
ture à la curiosité malsaine. Il y a des recoins dans la
science où l'on bat monnaie avec une question comme
celle-là en la remuant jusqu'à la lie.
— Eh bien, laissons là le singe et ses corréligionnai-
res pour en revenir à ma fiancée. Vous croyez donc, doc-
teur, qu'I-ka-eh n'est qu'une Mongole ?
— Pas du tout ! Elle est de pure race aryenne, comme
l'indique chez elle la courbe antéro-postérieure du crâne ;
le développement des os nasaux ; la direction verticale
du malaire ; les lignes ovaloïdes de la face et du calva-
rium; l'orthognatisme de la mâchoire et de la mandibule ;
le....
— Assez ! docteur, assez ! Cette étude de squelette me
donne froid dans le dos ! La noblesse de son origine est
écrite dans ses grands yeux intelligents en caractères bien
plus certains que tout cela.
— Mon ami, les yeux ne veulent rien dire et trompent
souvent. D'ailleurs, cette réflexion générale ne s'applique
point à votre sauvagesse. La science est d'accord avec le
récit qu'elle vous a fait. Son père fut sans doute un des
premiers émigrants que la race aryenne envoya dans nos
contrées, et cette supériorité de race vous explique l'au-
torité qu'il sut prendre sur la peuplade de Solutré. Ce
fait, à lui seul,est du plus haut intérêt ; car personne que
je sache n'avait jusqu'à présent rencontré le type aryen
à 1 âge du renne. C'est un signe des temps et la menace
d'un nouveau déluge plus long et plus terrible que le pre-
mier. La marée montante des invasions va bientôt en-
vahir la vieille Europe ! Et maintenant, mon jeune ami, ma
tâche est finie ; je sais ce que je voulais savoir. Quand
partons-nous ?
Je ne compris pas d'abord, et le docteur fut obligé de
répéter sa question.