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130             ÉTUDE SUR LE PATOIS LYONNAIS.
  Non, non, s'écriait le gai troupeau déjeunes filles, nous
ne les voulons point ! n'est-ce pas, Mireille ?
          — Se descoucouno pas, fagué, touli M jour !

   La récolte des cocons ne se fait pas tous les jours, ré-
pond la Chatoune du Mas !
   Encouragés par cet accueil favorable, les jeunes hom-
mes viennent se placer, chacun auprès de sa promise, fai-
sant mine de lui aider ; puis viennent les confidences, les
beaux projets, les châteaux en Espagne...
   « Moi, dit la belleLaure, je suis bien pauvre, voyez-vous ;
mais si, de n'écouter personne, j'avais la résolution, non,
 quand même le roi de Pamparigouste me ferait l'offre de sa
main, je prendrais plaisir à le voir se trainer sept ans à
mes pieds. »
   — Pas moi! pas moi! reprend Clémence,siquelqueroi,par
 hasard, de moi venait à s'éprendre, et qu'il fût jeune et beau
surtout, sans tant de caprices, je me laisserais bonnement
emmener par lui dans son palais; puis je m'en reviendrais
quelque jour, moi la reine, en mon pauvre pays des Baux,
et là, après avoir rebâti son vieux château en ruines, je
voudrais monter avec mon beau prince sur la plus haute
tour, et, coude à coude avec lui, appuyée sur le parapet'
quel plaisir de voir :
          Moun gai reiaume de Prouvenço
      Coume un claus d'arangié davans iéu s'espandi,
          E sa mar bluio estalouirado
          Souto si colo et si terrâdo,
          E li grand barco abandèirado,
      Poujanto à plen de vélo i ped dou castéu d'I.

  Voir devant moi mon gai royaume de Provence,tel qu'un
clos d'orangers s'épanouir; et sa mer bleue étalée, et ses
collines, et ses plaines, et, tout au loin, les grandes bar-
ques pavoisées, cinglant à pleines voiles au pied du châ-
teau d'If.