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74 LE CHAMP DES ESQUEVILLES. C'était dans ce quartier que les familles dont les reve- nus ne permettaient pas de gratifier d'un bûcher les corps de leurs parents décédés les faisaient inhumer, in hutno obruebant; on les jetait dans des fosses profondes, inputeis, vel puticulis (Varr. iv, 23. — v. 5. — P. Festus), et cet usage des fosses communes existe encore à Rome. Leur ouverture est recouverte de larg-es pierres de taille que l'on soulève pour y introduire les cadavres. Quelques auteurs prétendent que puteus vient de putres- cere, parce que les fosses servant aux inhumations don- naient une très-mauvaise odeur; mais je me range à l'opinion de P. Festus, qui fait dériver puteus a potu, boisson. Je pense au contraire que c'est de puteus que sont venus les mots putrescere, putridus, putrefactio ; parce que les puits creusés au sein du quartier des Esqui- liœ répandaient naturellement une très-mauvsise odeur. On comprend parfaitement que le Campus Equilinus ne devait pas être réputé pour sa bonne tenue et sa salubrité. Il devint par conséquent le type de la malpropreté, et les ordures que l'on y entassait n'étaient autres que les cada- » vres qui, tombant en putréfaction, y répandaient une très-mauvaise odeur : de là esquiliœ ou équevilles pour désigner des ordures. Avec l'agrandissement de Rome, le champ des morts, tout en conservant son nom, dut s'éloigner de la ville. Le fait est parfaitement constaté par Horace, lorsque, parlant de certaines mesures de salubrité exécutées sous le règne d'Auguste, i l d i t qu'il est permis d'habiter le quartier des Esquilies, devenu salubre : Nunc licet Esquiliis habitare salubribus (Od. I. 8, 14). Au reste, Mécènes avait établi ses jardins dans ce quartier, et cette circonstance vient à l'appui de ce vers d'Horace.