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BULLETIN BIBLIOGRAPHIQUE. 387 Le système intellectuel de Platon reconnaît les facultés secondaires et les distingue nettement de la plus importante faculté , la raison. Il sépare pro- fondément la sensation d'avec l'idée, et l'idée contingente d'avec l'idée en soi, l'idée absolue, générale, nécessaire. En passant des facultés intellectuelles aux facultés morales, on trouve Pla- ton généralemeut conforme aux croyances du sens commun. Si l'homme agit, ce n'est pas pour agir ; s'il veut, ce n'est pas pour vouloir : c'est pour être heureux. Ce besoin nécessaire, universel, impersonnel, rie vient pas de l'homme, et conséquemment n'a pas l'homme pour fin dernière , mais il vient de Çie'u même et se rapporte à lui. Dieu est le premier et le dernier anneau de la chaîne des êtres. Platon ne pouvait oublier le rôle de la volonté dans le monde moral, et il en subordonne le développement à trois conditions: les dispositions de l'or- ganisme, l'éducation, l'inspiration divine ; en sorte que l'individu n'est rien , hors de la société pour laquelle il est fait, 11 qui est faite pour lui. La société a le droit de se défendre de la contagion du crime, mais le criminel peut ob- tenir d'elle les moyens de retourner à fa vertu. Les conséquences de la Psychologie de Platon se trouvent indiquées à la suite de l'étude spéciale de M. Tissandier, sur les quatre facultés que le phi- losophe grec reconnaît dans l'âme humaine, à savoir : la sensibilité psycho- logique, la sensibilité morale, la raison et la volonté. Ces conséquences sont, en logique, l'induction placée au-dessus de toutes les autres méthodes scien- tifiques ; en esthétique, l'anéantissement même de l'art, auquel se substitue la pure contemplation du beau absolu ; en morale, l'importance de la phi- losophie et de l'éducation ; on politique, le règne absolue de la justice rem- plaçant les calculs de l'astuce et des passions, le caractère éminemmaiil mo- ral des gouvernements qui, selon lui, ne doivent être qu'un système complet d'éducation, organisée eu vue de la Société qui leur confie 6es intérêts spi- rituels et matériels. M. Tissandier abandonne Platon sur ces limites dernières, après avoir étu- dié avec une raison sérieuse et digne, et exposé,^dans un langage naturel et sobre, ce qui était du ressort de la Thèse. Elle nous a semblé très-méritante. Si nous en dépassions les bornes, si nous considérions le plus grand phi- losophe de l'antiquité à l'application, nous verrions dans ses livres les systèmes les plus révoltants, les plus indignes de la philosophie la plus médiocre. C'est que, en effet, ce splendide écrivain qui éclaire des lumières de son esprit tant de questions graves, n'a pas rougi de consacrer l'esclavage, l'immoralité , le libertinage. Il a, de ce côté-là , uue série d'affirmations qui humilient profondément notre pauvre raison humaine,s'exprimaut par le plus habile de ses organes dans l'antiquité payenne. - F.-Z. C.