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SDR LA VIE ET LES OEUVRES DU P. DES BILLONS. 205 sentit des douleurs plus aiguës, recourut à un des meilleurs mé- decins de la ville , prit des remèdes qui le soulagèrent un peu, et se remit à sa vie ordinaire. Ce mieux ne dura pas longtemps ; vers le milieu de janvier, un rhume opiniâtre lui ôta l'appétit, le sommeil et la facilité de la respiration. Il pensa à faire son testament, et l'écrivit en cent trente-six vers, de la même élé- gance et du même mètre que ses Fables. Ce dernier monument de son goût pour la poésie latine, est aussi celui de sa piété, de sa religion et de sa reconnaissance. Il commençait par remercier Dieu de deux grâces spéciales, le bonheur d'être né de parents vertueux et catholiques, et celui d'avoir été admis dans la Compagnie de Jésus. Il faisait ensuite sa profession de foi et d'adhésion entière à tous les dogmes et à toutes les vérités que l'Église romaine ordonne de croire. Il ex- primait, dans les termes les plus énergiques, le désir qu'il avait de quitter le monde. Ses vers, en cet endroit, devenaient des soupirs ardents ; son cœur s'élançait vers le ciel. Il reconnais- sait avec ingénuité, qu'il s'était trop livré à la passion des livres ; se reprochait d'en avoir acheté un si grand nombre, parmi les- quels il y en avait de dangereux pour la foi et les mœurs ; il protestait que, en les achetant, il n'avait eu que des intentions pures, et que jamais aucun de ces livres n'avait porté la moindre atteinte à ses mœurs ni à sa foi. Afin de prévenir l'abus qu'on en pourrait faire, et rendre à Dieu ce qu'il tenait de sa libéralité, il léguait sa bibliothèque aux prêtres de la Mission (les Laza- ristes), pour qu'elle se conservât fidèlement dans leur collège de Manheim, et que le Supérieur réglât l'usage qu'en feraient les particuliers. Il y mettait pour condition rigoureuse, que tous les livres resteraient constamment réunis et attachés à la même maison, que nul Supérieur ne permettrait de les distraire et de les désunir, et que personne n'en prêterait à des étrangers sans la permission du Supérieur. Il voulait cependant qu'on choisît, parmi tous ees livres, ceux qui manquaient à la bibliothèque palatine, et qui, par leur rareté, seraient jugés dignes de trouver place dans cette riche collection ; il chargeait les Lazaristes, ses héritiers, de demander, en son nom, à son auguste bienfai-