Revue du Lyonnais » série 2 - n°4 ( 1852 ) » pp.284

284         SUR L'ENSEIGNEMENT DE LA PEINTURE.
crête , et dont l'esprit n'a pas été suffisamment cultivé. Il ne
suffit pas, pour former un peintre, de lui enseigner à tracer des
lignes et à mélanger des couleurs. S'il n'a pas acquis, dès la
jeunesse, l'instruction nécessaire au développement de son ima-
 gination , et s'il ne porte en son âme cet ardent amour de l'art,
 nécessaire à la perfection du talent, jamais son nom ne saura
parvenir à la postérité. Un peintre anglais, célèbre par ses œu-
vres en peinture et par ses écrits sur les arts, Reynoîd a dit
 que les qualités d'un excellent peintre sont, d'avoir le jugement
bon, l'esprit cultivé, le cœur sensible, les sentiments élevés,
de la candeur, de la santé , de la jeunesse, une fortune hon-
 nête, le goût du travail, l'amour de son art, et d'être sous la
 discipline d'un bon maître ! Eh bien ! j'en appelle à tous ceux
 qui ont quelque sentiment des arts, notre école étant établie
pour la classe laborieuse, est-il probable d'y rencontrer quel-
qu'un qui puisse posséder les qualités essentielles pour devenir
 un peintre habile ? Tous en ont la prétention , sans doute, mais,
 à part quelques exceptions, lorsqu'ils ont atteint la dernière pé-
 riode de leurs progrès , ils retombent alors de toute la hau-
teur où ils sont parvenus, dans un abîme d'incertitude et de
dégoût ; n'ayant appris que le mécanisme de l'art, ils compren-
 nent alors leur nullité, et finissent par traîner une existence
 misérable, cherchant à s'excuser de leur ignorance, en criti-
 quant les Å“uvres de leurs contemporains, dont ils sont inca-
 pables de juger le talent.
   Ne serait—il pas temps enfin de rendre à notre École la des-
tination pour laquelle nos ancêtres l'avaient fondée ? Lors de sa
fondation, elle fut spécialement destinée à former des dessina-
teurs, capables de diriger nos manufactures d'étoffes dé soie ;
et, certes, l'élégance et la richesse de leurs productions, qui ont
fait la prospérité de cette ville dans le siècle dernier, ont suf-
fisamment prouvé que cette école avait atteint son but. Mais, en
formant des dessinateurs habïles et célèbres, tels que