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 20                         ESSAI HISTORIQUE
 environnait les pontifes romains : « Ceux qui ont été choisis,
 dit-il, pour cette dignité, sont enrichis par les présents des da-
 mes romaines; ils sont portés sur des chars, vêtus d'habits ma-
 gnifiques. La somptuosité de leur table surpasse celle des tables
 impériales (1). « Faites-moi évêque de Rome, disait alors le pré-
 fet Prétextât au papeDainase, et je me fais aussitôt chrétien. »
Il faut l'avouer, ces témoignages émanés de sources payennes,
sont, avant tout, une satire de ce qui semblait un abus à
des yeux! disposés à ne voir dans le Christianisme qu'une aus-
tère simplicité; ils prennent évidemment par ignorance ou à
dessein la splendeur du pontificat pour le luxe personnel de
l'homme ; les offrandes déposées entre les mains de l'économe
des pauvres, pour des .présents destinés à satisfaire une ambi-
tion mondaine ; les somptuosités occasionnées par les nécessités
de position, pour une manière habituelle de vivre. Mais, quel
que soit l'esprit de ces témoignages, ils n'en signalent pas moins
dans la Papauté d'alors l'existence d'une véritable grandeur
temporelle. Ne devait-elle pas être déjà considérable, puisqu'elle
frappait les regards des payens ?
   Cette grandeur temporelle tenait à deux causes, dont l'action
était déjà puissante à cette époque. La première était le pouvoir
 arbitral qu'avaient les pasteurs de l'Eglise de prononcer dans
les différends qui s'élevaient parmi les fidèles ; pouvoir dont les
évèques furent mis en possession dès l'origine même du Chris-
tianisme ; pouvoir qui n'était pas, tant s'en faut, une consé-
quence de leur ministère spirituel, dont aucune loi n'avait pu
les investir, qu'ils tenaient uniquement de la confiance publi-
que ; pouvoir qui était pour eux bien plus une charge qu'un hon-
neur, dont beaucoup auraient souhaite d'être dégagés; mais
qui, en les mêlant aux intérêts matériels de leurs ouailles,
donnait à leur administration un air de souveraineté (2).
  La- seconde cause, c'était la richesse progressive des églises.
De bonne heure, la nécessité de pourvoir aux besoins des pas-
  Ci) Ammian. Mareell., lib. XXVII, c. TV.

  (2) S. Hicron, l. II, p. 329, «dit. tiad. de F. Z. Collombet.