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DU NOM DES AUTEURS. Le commun des mortels reçoit son nom de sa famille et de son parrain ou de sa marraine ; mais les plus grands citoyens actuels de la République des lettres ne relèvent que de leur propre autorité pour se baptiser; ils choisissent et portent un nom comme un habit, et sans que cette fan- taisie leur coûte rien; bien au contraire, ils changent souvent leur nom dur, rocailleux, plébéien, contre un autre plein d'euphonie et de noblesse, car une fois en chemin de con- quête a cet égard, ils ne s'arrêtent point devant le scrupule de s'emparer aussi des titres héraldiques, ils s'arment eux- mêmes chevaliers, et s'octroyent sans gêne des comtés, des marquisats, des baronnies, etc. ; ces Messieurs font aussi une consommation considérable de particules nobiliaires ; c'est comme un clou où ils accrochent et suspendent leur roture afin de s'élever un peu et de la rendre ainsi plus respectable aux yeux de nombre de badauds qui alors y regardent à deux fois avant de siffler l'auteur protégé par un titre ou défendu par un de. Deux grands hommes des siècles derniers eurent la même