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134 DU PRINCIPE MORAL où nous sommes, plus un langage est élevé, plus il est rationnel, plus il est religieux, et mieux il est senti par ces multitudes au sein desquelles palpitent tous les grands instincts de l'humanité. On a dit, avec raison, que la voix du peuple est la voix de Dieu ; il faut ajouter : la voix que le peuple comprend toujours, la seule voix qui l'émeuve profondément, c'est la voix de Dieu, c'est une parole qui adjure le peuple au nom des plus grandes idées, des sentiments les plus nobles, des plus religieux devoirs, des plus austères dévouements. Qui fera entendre cette voix de Dieu à la foule, si ce n'est l'homme qui l'a entendue lui-même, qui l'a écoutée avec recueillement dans ces hautes régions de l'esprit où l'inspiration n'est pas étouffée par le bourdonnement des pas- sions vulgaires et des vulgaires intérêts ? Spectacle merveilleux et rassurant, de voir l'ère qui commence trouver la personnification de sa première et de sa plus grande journée dans un homme qui n'a jamais fait entendre que des paroles de paix et d'amour, qui n'a jamais parlé qu'au nom des sentiments les plus élevés de l'âme humaine ! Entre cette intelligence formée dans la région la plus calme et la plus plus pure et l'intelligence ardente et passionnée de la multi- tude, l'harmonie s'est faite subitement au sein de la grande pensée de l'ordre et de l'union fraternelle. Le poète a été aussi éner- gique , aussi fier que ces hommes du champ de bataille, et les hommes sont devenus aussi paisibles, aussi intelligents que le poète. La main de Dieu s'est montrée des deux parts. Arrière donc toute crainte de voir triompher la force bru- tale, et régner les grossières passions, quand, pour instruire l'Europe et nous-mêmes du sens de la Révolution actuelle, la Providence a voulu que la première parole qui résuma la pensée de tous, que le premier nom porté sur le pavois populaire, fussent la parole et le nom de Lamartine. Ainsi notre littérature, notre poésie moderne en ce qu'elles offrent de plus pur et de plus élevé, sont associées à ce qu'il y a de plus grand, à ce qu'il y a plus de plus sage dans le mou- vement qui vient de replacer la France dans les véritables voies de la civilisation. Cette littérature, cette poésie nouvelles,