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                            GERSON', POÈTE.                           289

si remarquable contient une telle profusion de beautés poéti-
ques, que le grand Corneille l'a traduit tout entier en vers fran-
çais ; il en existait déjà sept traductions en vers français; neuf
en vers latins et une en vers italiens ; mais, comme l'a dit M. Mon-
falcon, « le fonds de ce livre était si beau, qu'il a nui à la forme ;
et tant d'éloges ont été donnés à la sublimité de la morale, qu'il n'en
est pas resté pour la poésie du langage. »
    Après ce parallèle du poème de Rachel et de Jacob avec des pas-
sages de Y Imitation, peut-on soutenir que Gerson, poète, n'a pas
dû être l'auteur do l'Imitation? Peut-on soutenir qu'il n'était pas
doué de cette sensibilité naturelle, de cette délicatesse de sentiment
qui ont inspiré à l'auteur de VImitation les pensées pleines de grâce
 et d'élégance qui enrichissent son ouvrage ?
     Il est bien certain que Gerson, soit en vers, soit en prose, a ex-
 primé avec un style vif et brûlant le feu célesle qui l'animait
 dans son amour pour la théologie, et dans son amour pour la di-
 vinité; sas deux ouvrages, au surplus, ont la forme du colloque.
     A l'égard des êtres imaginaires que l'on prétend opposer à Gerson,
 il serait impossible d'établir un semblable parallèle, leurs produc-
tions étant aussi inconnues que leurs personnes sont fantastiques et
fabuleuses: on ne peut combattre des fantômes.
    Quant à A-Kempis qui a réellement existé, et dont les œuvres sont
peu volumineuses, le parallèle de ses écrits avec l'Imitation ne lui
 serait pas favorable. Il s'en fait que son style soit poétique, ce
qui sera démontré plus lard; mais ce qu'il importe de remarquer dès
à présent,c'est que A-Kempisest né 17 ansaprès Gerson, et qu'il n'a
été que son copiste maladroit, car, voulant embellir le style de son
maître, il est tombé dans le burlesque ; il a, dans ses écrits, pro-
digué un luxe de figures,de (leurs de rhétorique forcées et ridicules,
qui ne sont nullement dans le goût simple et élevé de l'auteur de
^Imitation; aussi A-Kempis et ses œuvres n'ont pas échappé au
fouet satyriquo de Boileau :


           Alain (ousse et 51 lève ; Alain ' c savant lit>mme,
           Qui de lîauny vingt fois a lu toute la Somme,

                                                                 19