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519 CHRONIQUE LOCALE. Grâce à la généreuse intervention de quelques-uns de son concitoyens, la réédification de la statue de Jean Cléberg est définitivement arrêtée, et une souscription est ouverte pour arriver à ce but honorable. La slatue sera en fonte. Elle est confiée à un jeune sculpteur, M. Lepind, qui nous a déjà donné les statuettes de Jacquard et du major général Martin. Nous aurions désiré que la voie du concours eût désigné l'artiste chargé de roproduire l'image de l'homme bienfaisant dont le rocher de Bourgneuf et la tour de la Belle-Allemande (r) ont amené le souvenir jusqu'à nous. Le projet que nous avons sous les yeux ne nous satisfait pas et nous aimons à croire qu'il su- bira de nombreuses modifications avant que l'artiste exécute son œuvre. La pose de Cléberg est commune, de mauvais goût, sans aucune signification. La main gauche, placée sur le coté, ne peut y trouver un appui, attendu que le corps repose sur la jambe droite. La bourse traditionnelle que Cléberg tient dans sa main devrait bien être rejetée pour l'aumônière que l'on portait alors pendue au côté. Nous aurions préféré voir dans cette main le testament qui assure à l'Aumône générale ( l'hospice de la Charité ) une somme de 7 0 , 0 0 0 fr. On eût ainsi consacré un des plus beaux titres de J e a n Cléberg, titre autrement précieux et plus authentique que celui de marieur des pauvres filles de Bourg- neuf. Nous aurions voulu que l'autre main reposât noblement sur l'épée. Car il ne faut pas oublier que le bon allemand fut un homme d'armes, qu'il com- manda, dans l'armée de François I' 1 ', une compagnie de lansquenets, qu'il se dis- tingua à la bataille de Pavie, où il sauva, dit-on, la vie du roi lui-même, dont il partagea volontairement plus tard la captivité. Nous ne savons guère, enfin, où M . Lepind a pris le modèle de sa toque, si ce n'est sur la tête de quelques comparses de nos théâtres. Nous le renvoyons à des sources plus sûres. Notre administration fera sagement de nommer, pour la réception du projet définitif de l'artiste, une commission composée d'hommes spéciaux. Une statué en fonte est un legs fait à nos neveux, et il convient, dans l'intérêt de celui dont nous voulons perpétuer la mémoire, de ne pas leur donner une trop mauvaise opinion de notre goût et de la statuaire au X I X e siècle. Nous avons déjà bien assez de notre informe Jacquard. Son auteur, M . Foya- tier, reconnaissant, dit-on, la justesse des nombreuses critiques dont son œuvre a été l'objet, doit venir y faire toutes les modifications qu'il lui sera possible d'imprimer à la fonte. Hélas ! pour la plus grande gloire, que ne se hâle- t-il de rendre au feu celte fonte pour lui donner une autre forme ! S'il ne fallait pour cela qu'une souscription, elle serait bien vite remplie. Dans une époque où l'argent ne serait pas tout, jamais statuaire n'eut laissé exposer une aussi lourde, une aussi grossière erreur ! Tinssent les bas-reliefs que Compose notre compatriote, M . de Ruolz, dédommager nos regards de cette affligeante image ! Pauvre Jacquard ! Une grille, nous assure-t-on, mais nous ne pouvons y croire encore, doit entourer la fontaine et en défendre l'approche. Aux quatre coins, des bor- nes fontaines distribueraient l'eau pour les besoins du quartier. Si cette fon- taine avait des proportions monumentales, si son bassin était à une certaine élévation du sol, et que l'onde y tombât en nappes ou en diflérents jets (1) Pélonne de Boiizin, native de Tonrnay en Flandres, retire de noble Jean