page suivante »
288 plus grand nombre, laissaient leurs os sur quelque rivage ; les autres, c'était le petit nombre, passaient rois ou empereurs: quelques-uns accomplissaient heureusement leur pèlerinage, mais ils revenaient ruinés, ils avaient dépensé les fonds hypo- thécaires, comment se libérer? Les communes tinrent bon, les monastères aussi, les grands feudataires aussi, les rois aussi, et le nombre des petits fiefs diminua sensiblement, le petit baronnage s'éteignit, les petits vassaux se mirent au service d'un grand seigneur, se firent sujets d'un grand seigneur, su- jets du roi : de là cette absorplion des petits domaines, cette concentration du pouvoir qui est un des faits caractéristiques du treizième siècle. En ce sens, surtout, les Croisades ont contribué à la ruine de la féodalité, à l'extension du pouvoir royal, mais en France seulement, mais par un accident indé- pendant de la politique des rois, par le cours naturel des cho- ses. En retour de son crédit et de sa richesse, la noblesse con- serva un nom, des titres, des distinctions honorifiques, elle seule put jouter et tournoyer, elle seule fut admise dans les ordres de chevalerie, glorieux restes d'un temps qui n'avait pas été sans gloire, mais qui était passé sans retour. Ainsi s'en allaient et tombaient une à une toutes les choses du moyen-âge, féodalité, chevalerie, croisades; la papauté, et nous ne parlons ici que de la puissance temporelle de la papauté, la papauté aura bientôt son tour... C'est donc une ère nou- velle qui commence : mais n'oublions pas au prix de combien de larmes, de malheurs et de sang ! J'estime que l'engouement et le mépris du passé sont ridicules au môme point. Ce moyen- ilge si poétique avec ses grandes basiliques et son majestueux cortège de papes, d'évêques, de barons et de chevaliers, n'était pourtant qu'une de ces laborieuses époques où s'enfantait pé- niblement tout le bien-être de la nôtre, où l'on vivait au jour le jour, et où chaque jour, hélas! n'apportait pas son pain ! Ach. FRANÇOIS.