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nu crédit qu'elle sait si bien faire valoir quand il s'agit d'intérêts particuliers ?
A en juger par les résultats, il est permis de croire le contraire. En attendant,
non seulement les enfants de la population ouvrière de notre ville demeu-
rent privés d'un bienfait qui leur était destiné, mais on décourage les h o -
norables citoyens qui, animés d'une pensée de bien public, seraient tentés
d'imiter le noble exemple de M . Eynard. Ai-je besoin de dire qu'aveuglés
par l'intérêt personnel, les collatéraux font valoir en leur faveur de pitoyables
arguments. On ne croirait pas qu'ils osent invoquer en leur faveur la mo-
rale, si l'on ne savait à quel point sont aujourd'hui dépravées les idées
morales en ce qui touche à l'intérêt public, aux droits d'une cité, aux droits
de l'Etat. Un des arguments sur lequel on insiste le plus est celui de la
captation. Hélas ! nous ne sommes pas accoutumés à voir en dehors des commu-
nautés religieuses, des administrateurs prendre si chaudement à cœur l'intérêt
général qui leur est confié, qu'on puisse légitimement les accuser de cap-
tation. Au reste, dans le cas actuel, M . Montmartin fait bonne justice de
cet argument. Mais d'ailleurs, lorsqu'il s'agit d'intérêt public ce reproche
de captation est un reproche dont il ne faut pas s'épouvanter. Autant la
captation qui s'exerce en secret au profit d'un intérêt privé est méprisable
ou odieuse, autant une captation qui s'exercerait publiquement au nom d'un
intérêt   général serait noble et légitime. J e n'ai jamais compris comment
l'État ou les villes négligeaient de faire jouer       un ressort qui pouvait si
puissamment contribuer au bien public. Si ce ressort était habilement mis eu
jeu, combien de citoyens au lieu de laisser leur fortune à des collatéraux
insouciants ou désireux de leur mort, en doteraient l'État ou leur ville na-
tale. Non seulement une telle captation serait utile dans ses effets, mais en-
core elle serait d'une haute moralité dans son principe, car elle tendrait à
exciter dans les âmes le sentiment du bien public. Pourquoi donc la ville
de Lyon, par exemple, n'aurait-elle pas dans son Hôtel-de-Ville une salle
consacrée à la mémoire des bienfaiteurs de la cité ? Pourquoi ces noms, dans
des cérémonies publiques, ne seraient-ils pas rappelés à la mémoire de leurs
concitoyens reconnaissants? Pourquoi les rues, les places, les monuments
publics ne porteraient-ils pas les noms de ceux qui par leurs largesses au-
raient contribué à en doter la v i l l e ? J e suis persuadé que des moyens de
celte nature, employés habilement par une administration intelligente, ne de-
meureraient pas sans résultats et augmenteraient les ressources de la cité de
manière à lui permettre de réaliser quelques grandes et urgentes améliora-
tions. Mais il n'en sera pas ainsi tant que l'exécution des volontés de ceux
qui consacrent leur fortune à un œuvre d'intérêt général rencontrera autant
de délais et d'obstacles.