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 de renfermer des critiques, des études et des projets utiles à une grande cité
 dont la prospérité est, plus qu'on ne croit, sourdement minée par un mal conta-
gieux, héréditaire, ruinant la force physique et morale de la population, et cons-
tituant ainsi un de ces éléments redoutahles de décadence qu'il faut savoir arrê-
 ter dans leur développement, sous peine d'avoir à en déplorer plus tard les
 irrémédiables effets.
     Qu'importe, après cela, notre silence sur quelques imperfections dans la
 forme et la rédaction de l'ouvrage, sur de légères erreurs de calcul, sur des
 renseignements puisés parfois peut-être à des sources peu authentiques ? L'au-
teur ne s'est pas dissimulé ces imperfections ; en indiquant lui-même les cotés
 vulnérables de son œuvre, il a su désarmer la critique qui lui lient compte, à
 son tour, des difficultés de l'entreprise.
    Des les premières pages, l'auteur pose en principe la nature contagieuse de
la syphilis. Cette vieille croyance, établie par les premiers témoins de l'invasion
 du iléau, exagérée par eux peut-être, a besoin d'être encore proclamée ; tant
l'esprit de l'homme a de tendance à se fourvoyer dans des aberrations systéma-
tiques, au détriment même des plus chers intérêts de l'humanité !
     Ainsi, la syphilis est aujourd'hui encore comme à son origine, une maladie
  contagieuse, héréditaire, infectant toute la constitution, et, clans ces derniers
 temps, l'inoculation, pratiquée par divers médecins dans un but d'expérimenta-
 tion clinique, est venue démontrer la vérité de cette assertion. Au point de vue
 de l'auteur, il était important de fixer cette opinion si controversée et dès-lors on
 comprendra avec quel soin il a dû rechercher les causes de la propagation du
 mal au sein d'une ville populeuse comme Lyon. Ces causes sont nombreuses :
 longuement développées dans l'ouvrage, elles ne peuvent être qu'indiquées ici.
     Lyon, par sa position topographiqué, fut une des premières villes de France
 où se répandit la contagion du mal napolitain, au retour des armées de Charles
 V I I , et, quelques années plus tard, Rab'elais, alors médecin de notre Hotel-
 Dieu, fit remarquer que la prostitution, répandue à Lyon, était très dange-
 reuse.
     Par sa condition de ville manufacturière, notre cité a toujours offert à la
propagation de la syphilis une extrême facilité. Ici, en effet, se trouvent réunies
 les causes les plus actives de la contagion : agitations politiques pendant et
après lesquelles on voit la maladie sévir avec une nouvelle intensité; crises
industrielles pendant lesquelles l'ignorance et la détresse poussent les classes
ouvrières à la corruption et multiplient les victimes du fléau; amour des plai-
 sirs dispendieux el du luxe, en opposition avec l'exiguité du salaire de la main
 d'œuvre ; organisation du travail fondée sur la grande manufacture avec la
 réunion des sexes ; concurrence illimitée dans le commerce réduisant de plus
 en plus le salaire de l'ouvrier ; protection abusive et séductrice des chefs de
l'industrie manufacturière provoquant au concubinage, célibat croissant cha-
 que jour ; Lyon, comme cité importante en science stratégique, convertie en
 ville de guerre et renfermant une garnison de seize à dix-huit mille hommes à
 laquelle la contagion syphilitique enlève par an un centième du service actif.
     Lyon, p a r l a constitution de son action administrative, isolée des faubourgs qui
 renferment une population presque égale à la sienne, voit ainsi autour de son
 enceinte des asiles ouverts aux prostituées qui fuient la surveillance de sa police
 sanitaire.
     Lyon enfin, peuplé de 2 0 0 , 0 0 0 âmes, donne, selon les calculs de l'auteur, une
 telle proportion de femmes vivant dans la prostitution que nous croyons devoir
 passer sous silence le résultat de ses recherches à cet égard, renvoyant à son livre
 la curiosité du lecteur.
     En donnant au mot prostitution son sens le plus large, l'auteur range les pros-
 tituées en trois classes: