page suivante »
100 poursuivit la réalisation de ses projets. Richelieu le comprit ; il inspira ses idées à cet adroit et habile abbé italien, Giulio Mazarini, dont nous l'avons vu se servir dans plusieurs cir- constances, et auquel il avait fait donner le chapeau de cardinal. En lui léguant sa politique, en le présentant à Louis XIII comme le seul homme digne de recevoir sa succession et de le remplacer dans le conseil, Richelieu rendit à la France un service qu'elle ne comprit pas aussitôt sans doute, mais qui n'en fut pas moins incontestable. Le grand ministre sut ainsi, si je puis me servir de cette expression, se survivre à lui- même. Les résultats intérieurs sont peut-être plus grands encore. Il ne faut pas cependant se les exagérer, ni surtout louer Richelieu de choses qu'il n'a pu ni voulu faire. Ainsi, beau- coup d'historiens l'ont présenté comme l'héritier et le con- tinuateur de Louis XI ; ils lui ont attribué la gloire d'avoir détruit la féodalité que ce prince avait seulement ébranlée. Il y a certainement beaucoup de vrai dans cette opinion ; mais il ne faut, toutefois, l'admettre qu'avec une certaine réserve et quelques restrictions. La haute féodalité avait été entière- ment ruinée par Louis XI, surtout par la réunion des derniers grands fiefs à la couronne. A dater de ce roi, il n'exista plus de princes souverains et indépendants en France : les ducs de Bourgogne, les comtes' d'Anjou et de Provence, avaient vu leurs États réunis ou confisqués par le roi, et, quelques années plus tard, la Bretagne avait été conquise. Ainsi, à la suite des efforts de Louis XI, aucun seigneur ne pouvait plus exercer sur ses terres les droits de la souveraineté ; partout ils furent remplacés par des gouverneurs nommés par le roi, levant les impôts et les armées en son nom, responsables de leurs actes devant l'autorité qui les avait délégués. Mais l'esprit féodal ne pouvait pas disparaître en même temps que le régime féodal, et au fond de plus d'un cœur et dans