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tes, Messieurs, si je n'avais pas la conviction de pouvoir rendre
à la philosophie un véritable service, un service plus grand que
jen'ai pu en rendre jusqu'à ce jour, je ne serais pas devantvous.
Voilà mon opinion ! Mais je suis bien loin de prétendre et en-
core moins d'exiger que cette opinion soit celle de tout le
monde. J'espère seulement pouvoir prouver que nul n'a le
droit de me voir d'un mauvais œil à cette chaire où je me
trouve appelé. On m'accordera donc la faveur de quelques ins-
 tants d'attention pour entendre la réponse qu'aujourd'hui et
dans toute la suite de mon cours, je dois et suis dans l'inten-
tion de faire à la question « Die cur hic. » N'ai-je pas assez
long-temps laissé le champ libre aux autres, sans me jeter dans
la voie de ceux qui auraient voulu ou pu atteindre au même but
dans la science.
    Si je suis arrivé dans cette carrière à quelque chose qui soit
digne d'être lu en ces lieux, et qui mérite l'attention d'une as-
semblée aussi éclairée que celle que je vois devant moi, le
chemin en était ouvert à tout le monde et personne ne pourrait
m'accuser dem'être trop hâté pour prévenir mes concurrents.
    Il y a aujourd'hui quarante ans que je suis parvenu à tourner
un nouveau feuillet dans l'histoire de la philosophie ; une page
de ce feuillet est actuellement remplie, et j'aurais vu avec plai-
 sir qu'un autre que moi en eût tiré tous les résultats et en eût
 couvert la page restée en blanc.
    Quand je vous assure, mes Auditeurs, que j'ai senti toute la
 grandeur et toutes les difficultés de la tâche qui m'a été impo-
sée, tâche que cependant je n'ai ni déclinée ni refusée, je mon-
 tre certainement par là, que j'ai la conscience de ma mis-
sion. Mais cette tâche, je ne me la suis pas donnée, elle m'a
été confiée sans que j'aie rien fait pour l'obtenir, et à l'heure
 qu'il est, il ne dépend pas de moi ni de la renier ni de la
 déprécier. Non, je ne me suis pas érigé moi-même en
  précepteur du siècle; si j'étais un tel homme, c'aurait été néces-