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         LE SYCOMORE.

Qu'est devenu ton frais ombrage,
Sous lequel l'amour s'exilait,
Sycomore dont le feuillage
Dans la voix des brises parlait !
L'hiver, flétrissant la parure ,
T'a frappé de son doigt de mort ;
Et dans tes rameaux sans verdure ,
Passe, en sifflant, le vent du nord.
Ta feuille que glaça l'automne,
Tombe à tes pieds, pâle beauté ,
Comme on voit tomber la couronne
Du front d'un roi déshérité.
L'oiseau fuit tes bras sans mystère ,
Et l'amant, au tomber du jour,
Sous ton ombrage solitaire ,
Ne surprend plus l'aveu d'amour.
Mais j'aime tes rameaux sans ombre ;
Je me plais au deuil de ton bois ;
Et si, quand descend la nuit sombre ,
A tes pieds je m'assieds parfois,
C'est qu'une secrète puissance
Fit mon destin pareil au tien ;
C'est que l'instint de la souffrance
Nous unit du même lien.
Comme toi, le sort humilie
Mon être qu'étreint la douleur ;
Arbuste étiolé , je plie
Au souffle incessant du malheur.