Revue du Lyonnais » série 1 - n°7 ( 1838 ) » pp.306

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q u i , Qdèle au moindre geste et docile sous sa destinée, s'a-
vance toujours avec indifférence vers son opprobre et sa
perte. Dix ans d'exil et le souvenir de ses persécutions sont les
seules garanties sous lesquelles les Juifs acceptent un nouveau
vasselage ; les ossements de leurs frères immolés se remuent
encore sous leurs p a s , un miracle les sauve eux-mêmes de
la t o m b e , et cependant les voici qui reviennent soumis ap-
porter leur tête au billot; bien mieux, ils renoncent à tout
espoir;ils attachent sur leurs vêtements ce signe de sacrifice;
ils indiquent, à l'aide de la r o u e l l e , la place où l'assassin
devra frapper pour rencontrer le cœur. Quel effrayant abat-
tement! quel abîme de démoralisation! Dira-t-on que c'est
aveuglement de leur part? mais on oublie que ces hommes
ont, pendant quatre mille ans, porté la lumière du i n o n d e ,
et depuis ce t e m p s , leur supplice n'a presque pas eu de re-
lâche ; le lendemain se lève pour eux aussi rouge que la
veille, autour d'eux tout crie encore au m e u r t r e , à la ven-
geance; pour eux point de caresses, point de promesses, point
d'espoir de salut ; ils sont montrés au doigt et comptés ; on
se partage d'avance leurs dépouilles. Comment ces h o m m e s ,
 formés à l'école du m a l h e u r , profonds dans les sciences,
 soupçonneux dans les affaires et mûris dans de sanglantes
 méditations,, n'auraient-ils pas vu ces choses ? La sagesse
 humaine se perd dans cette exploration de l'ame.
    Que si l'on veut expliquer ce mystère par le grand mot
 d'ambition judaïque, je répondrai que depuis les ordonnances
 de Philippe-Auguste, il est devenu vide de sens. L'intérêt et
 l'usure étaient désormais frappés au cœur, et les Juifs savaient
 bien d'ailleurs que la prospérité pour eux éclatait grosse de
 tempêtes. Disons-le d o n c , les Israélites , pourchassés, souf-
 frants , écrasés sous le poids de la v i e , voulaient au plutôt
 en finir avec elle ; toute lueur de résurrection sociale était
 éteinte pour eux. Si l'instinct de conservation les por-
  tail parfois à fuir la m o r t , vue de trop près ; ils se repro-
  chaient bientôt cette lâcheté du moment qui les condamnait