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Paradin rapporte avoir v u , à la date de la môme année ,
des lettres patentes du premier duc de Savoie, Ame, données
à T h o n o n , par lesquelles il prenait en sa sauvegarde les
Juifs qui lors habitaient ses t e r r e s , excepté ceux auxquels
le procès avait été fait à Châtillon et à Trévoux, et qui
avaient été convaincus et coupables des hérésies et blasphè-
mes par eux confessés devant les commissaires.
   Le pouvoir archiépiscopal triomphait ; Lyon et ses abords
avaient perdu les Juifs. Cependant la rancune des rois et du
clergé ne s'arrêta point à cette seule œuvre contre les Israé-
lites ; je ne sais point quels griefs imaginaires ne furent pas
inventés pour faire passer celte haine dans l'esprit des peu-
ples : d'absudes fables circulèrent dans la foule; de sacrilèges
forfaits furent imputés aux exilés, et dans toutes les malédic-
tions que le ciel faisait peser sur la France , le nom des Juifs
se trouva mêlé et confondu. L'ombre même de la société juive
avait été effacée du r o y a u m e , et cependant toutes les cala-
mités étaient regardées comme découlant d'eux. Il y avail
évidemment dans toutes ces accusations lâcheté et mensonge;
lâcheté, puisque ces coups dans l'opinion publique étaient
portés à des hommes absents et dont la voix ne pouvait s'éle-
ver pour se défendre ; mensonge, puisque les maux publics,
à supposer qu'ils ne prissent pas leur source dans les fautes
du pouvoir ou dans l'incurie des peuples , ne pouvaient, dans
tous les cas , être envoyés à la France comme punition de
crimes commis en dehors du royaume. N'était-ce pas là dé-
naturer la justice divine au profit de la haine ? Quoi qu'il en
soit, ces éternelles conjurations portaient leurs fruits contre
la synagogue ; peu à peu la contagion du fanatisme gagnait
de proche en proche l'ame des populations ; les Juifs, forcés
 de reculer devant les animosités occultes, mais ardentes et
 actives, voyaient se fermer derrière eux les ports dans les-
 quels ils avaient trouvé jusqu'ici l'abri contre la tempête.
 Les provinces méridionales les plus reculées leur restaient
 seules e n c o r e ; mais, vers l'an 1481, la Provence fut réunie