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«   et je veux vous empêcher de le consommer, car il vous
«    flétrirait à tout jamais. Je suis ici la barrière infranchissable
«   de l'honneur : vous ne pouvez plus faire un pas sans me
«   passer sur le corps. S'il vous faut du s a n g , voilà ma poi-
«   t r i n e , et vous pouvez y assouvir une soif féroce. Mais tant
«   que vous ne m'aurez pas foulé aux pieds, m o i , votre pre-
«   mier magistrat, vous ne porterez point une main sacrilège
«   sur des ennemis désarmés, sur des prisonniers que l'armée
«   française a confiés à votre loyauté, et qui d'ailleurs, â
«   défaut de loyauté , sont sous la sauve-garde de la loi, de
«   la loi que je r e p r é s e n t e , pour le respect de laquelle je
«   dois et nous devons tous vivre et mourir... »
   Nous n'essayerons point de retracer l'impression miracu-
leuse que produisit celle chaleureuse allocution. Un change-
ment subit s'opéra , et des vivais! pour le préfet succédèrent
aux cris de mort pour les soldats étrangers ; il n'y eut point
de sang v e r s é , et le droit des gens ne reçut aucune souillure.
   Ce jour, que M. Pons pouvait bien croire le dernier de sa
vie fut un beau jour pour lui, et souvent il a dû en appeler le
souvenir à son aide dans la tourmente des persécutions dont
il a été la victime. On est bien fort quand on puise sa force
dans ses belles actions!...
   Mais la France reprenait son voile funèbre; la fatale ba-
taille de Waterloo avait détruit les espérances des vrais amis
d e l à patrie... Echappé à ce grand désastre, le maréchal Ney
était venu à Lyon. Il demanda un passeport pour la Suisse
à M. Pons,, qui consentit immédiatement à le lui donner.
Mais l'autorité militaire, malgré l'état de siège, craignit d'as-
socier sa signature à celle du préfet. Alors M. Pons se décida
à délivrer le passeport sans aucun concours, en sa seule qua-
lité de commissaire de l'empereur. Il avait pourtant reçu des
ordres contraires. Le maréchal Ney d é l i b é r a , et ne voulant
pas compromettre le généreux magistrat qui lui fournissait
le moyen de se sauver, il tenla une autre voie de précau-
tion , voie décevante , q u i , en définitive , le livra à des ju-