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de Dieu, et faisaient appesantir son bras sur le m o n d e ; tantôt
on leur reprocha leurs blasphèmes et leurs sortilèges , tantôt
on les accusa de tuer des enfants chrétiens la veille de P â -
ques., et de prendre leur cœur et leur sang, afin de les mêler
aux hosties consacrées pour faire des prodiges. A l'appui de
ces faits, dont quelques-uns sont possibles, mais ne s'ap-
puient sur aucune autorité, on citait de nombreux miracles
accueillis avec fureur par la crédulité de l'époque ; des hos-
ties percées avaient versé du s a n g , e t , en 1399, dans un
village de la Pologne, un troupeau de bœufs se m i t , disait-on,
à genoux devant une de ces hosties s'envolant au ciel. Cet
hommage est au moins singulier ; mais dans tous les c a s , le
récit de ces prodiges manqua rarement son effet. A la suite
de ces excitations p o p u l a i r e s , bien des Juifs furent pillés,
massacrés, brûlés à petit feu, et pour autoriser ces crimes ,
un édit de Jean-le-Bœuf, duc de Bretagne , portant la date de
1239, défend d'informer contre quiconque tuerait un Israélite.
   Au milieu de tous ces excès commis au nom d'une religion
de paix et d'amour, que faisait le Saint-Siège ? Le plus sou-
vent il se renferma dans le silence qui laisse faire, quelque-
fois même il devint un aiguillon : Innocent III écrivit en
France de traiter plus durement les Juifs ; mais, pies tard,
le souverain pontife intervînt dans la persécution de saint
Louis contre les Israélites; il rétablit le principe de la liberté
religieuse, pria le monarque de modérer une dévotion si b a r -
b a r e , et lui apprit qu'on devait laisser les juifs suivre les
mouvements de leur conscience.
   Aujourd'hui ces guerres de religion sont irrévocablement
passées ; mais le XIXe siècle aurait mauvaise grâce à se tar-
guer de ses principes de haute tolérance , même en matière
religieuse : cette année qui s'écoule vient en effet de donner
à ces principes un éclatant démenti ; elle nous a montré deux
monarques qui se disent sages , s'armant toux deux au nom
 du Christ, et violentant la conscience de leurs peuples : l'un,
pour le garantir d'un contact schismalique et rationaliste ?