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143 par les marteaux d'une sonate et d'un pot-pourri. Le malheu- reux opéra, que ce soit Guillaume ou Robert, aura le sort de M. Dimanche ; la livrée musicale se le repassera de mains en mains , depuis le pianiste jusqu'au joueur de flageolet, et le pauvre chef-d'œuvre , m u t i l é , moulu , flétri, décoloré, ira finir dans la rue , informe gagne-pain des orgues de b a r - barie ! En peinture , même spectacle ; el à vrai d i r e , de peintres, il n'en existe pas ; il n'y a guère que des fabricants de tableaux. On se préoccupe , non de ce qui est b i e n , mais de ce qui assure le meilleur débit. — Le vent tourne à la religion ; vite des sujets religieux , des madones , des moines , des Christ! on exhume l'Ancien et le Nouveau Testament, on fouille la vie des saints; c'est à croire que chacun va porter le cilicc et que les confessionnaux ne désempliront pas. Tout cela dure une saison , pendant laquelle la foule oisive et vide s'est ruée aux sermons d'un prédicateur en vogue , avec une aussi sainte croyance qu'elle courait précédemment ouïr la foi nouvelle à Ménil-Montant. Le carême suivant, la même foule ira brûler ailleurs son encens sans parfum.—Elle s'en- gouera du Moyen-âge ; les barbes, les poulaines reparaîtront, et le salon ne sera peuplé que de châtelaines , de pages, de croisés. Puis on remplacera l'invention et le sentiment par la servilité de l'imitation ; au lieu de s'inspirer à la source éternelle de toute vérité, à la nature , on remuera la cendre des siècles passés, comme si l'avenir était clos pour jamais; au lieu de pousser l'art en avant, on s'efforcera de le faire reculer, heureux si on pouvait le ramener jusqu'à son point de départ ! Le succès sera à ceux q u i , par une patiente habileté, reproduiront avec le plus de bonheur les essais in- complets et timides de la Renaissance. Personne ne veut ou ne peut être soi ; on dirait que l'ar- tiste a perdu la faculté de se passionner pour un but plus noble que la fortune. Le champ de la pensée est désert, nulle semence n'y pousse que celle apportée par le vent du passé.