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   La commune, à son tour, moins parcimonieuse, n'eût pas
donné la parade d'une population brillante, fêtant un magot;
elle eût fait présent d'une statue au rocher qui prêterait vo-
lontiers un bloc à la main qui pourrait l'y tailler.
    Attendrons nous long-temps encore des fêtes vraiment na-
tionales ?
    Si la statue de l'Homme de la Roche a été réellement éle-
vée à la mémoire d'un bienfaiteur de l'humanité, ne faudrait-
il pas la remplacer par un monument plus durable, plus
digne, qui rappelât autrement que par le ridicule les vertus
 qu'on veut honorer et les actions dont on croit utile de per-
pétuer le souvenir ? Quand bien même l'Homme de la Roche
 ne serait qu'un être idéal, sa statue le résultat d'une erreur
 populaire perpétuée par la personnification d'une pensée gé-
 néreuse, peut-être vaudrait-il mieux permettre à Cléberg
 d'usurper quelques honneurs que de laisser subsister ce misé-
 rable tronçon qui semble ne rester debout que pour égayer
 les étrangers à nos dépens, et leur donner une singulière
 idée de notre culte pour les arts. En effet, le peuple de Bourg-
 neuf tient à son Homme de la Roche; ses bienfaits, conte ou
 réalité, sont devenus une croyance, une tradition qui restera
 toujours gravée sur le dernier lambeau qui portera son nom.
 Mais c'est moins à l'homme qu'aux vertus qu'on lui prêle
  que l'hommage est rendu. Une statue élevée en mémoire
  d'un bienfait ne doit jamais être brisée , fût-elle celle d'un
 méchant qui n'eut dans sa vie qu'un éclair de vertu qui la lui
  mérita. Mais, pour Dieu,Ediles, donnez-nous une statue,
  et non pas un cadavre !
     Et si l'on fait de l'existence de ce monument une question
  d'art, qu'importe qui l'on représente, pourvu que l'image
  soit belle. A l'imagination appartient le ciel, l'enfer, la mort,
  la vie, l'univers entier. Rien qu'elle ne puisse fouiller, prendre,
  façonner sous le ciseau ou reproduire sur la toile. Faites des
  chefs-d'Å“uvre, et donnez-leur le nom que vous voudrez.
  Mieux vaut admirer la statue d'Héliogabale que de n'avoir rien