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difficile du cours du Rhône a été utilisée pour le flottage des
b o i s , au moins pendant quelques mois de l'année. Pour cela,
on a fait s a u t e r , en partie, les roches qui forment la p e r t e ,
et qui rendaient ce passage totalement impraticable. Lorsque
les eaux sont très-basses, le fleuve disparaît encore sous la
voûte de rochers, qui n'est pas entièrement détruite, et dont
l'épaisseur seule a été diminuée ; mais, lorsqu'elles sont plus
élevées , elles la recouvrent, et le passage devient possible,
uon pour des bateaux, non pour des trains de b o i s , mais
pour des troncs détachés et abandonnés à l'impétuosité du
courant.
    Voici donc comment s'opère le flottage des bois dans cette
gorge dont l'accès est défendu à l'homme. Les trains sont
amenés dans la partie navigable du cours supérieur jusque
près de l'entrée. A ce point, le marinier qui les a conduits
jusque là rompt les liens qui attachent ensemble les troncs
de s a p i n , et leur dit v a ! . . . Aussitôt ces robustes enfants de
la montagne se mettent en m o u v e m e n t , lentement d'abord,
puis avec rapidité, puis avec f u r e u r , et commencent leur
effroyable voyage. Ils se précipitent en tumulte dans les pro-
fondeurs du ravin, heurtant contre ses bords, se heurtant les
 uns les a u t r e s , tournoyant, bondissant de chute en c h u t e ,
 prenant une position tour à tour verticale, oblique ou paral-
lèle au courant. Quelquefois, lancés contre un roc qui barre
le lit du fleuve, ils se brisent comme un frêle chalumeau,
 ou, broyés contre ses parois, ils ne parviennent qu'en débris
a u débouché de cet horrible défilé.
    Souvent aussi il arrive qu'une longue et solide pièce de
bois s'engage par ses deux bouts dans les aspérités du rocher,
 e t se fix« transversalement au lit du fleuve , trop étroit pour
 lui livrer passage. Celles qui suivent s'arrêtent contre cet
 obstacle : d'autres arrivent, s'enchevêtrent avec les premiè-
 res ; toutes ensemble forment un madrier solide que l'impé-
  tuosité du courant ne peut rompre et qu'il ne fait même que
  consolider davantage.