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couronne de gloire, il n'y avait aucun moyen de prouver
à l'opinion inquiète que le bulletin de la victoire n'était
pas une impudente imposture, le Te Deum une indigne
jonglerie, El dans les régions même où se forgeaient les
armes de la calomnie, on finissait par ajouter foi aux in-
ventions de la haine. De tout cela se formait une sorte
d'opinion mal éclairée, mais sincère ; qu'on lise le célèbre
pamphlet de Chateaubriand : De Bonaparte et des Bour-
bons. Est-ce que notre grand écrivain eût prêté sa plume
à cet acte d'accusation si éloquemment faux et son nom à
cette publication qu'il désavoue, sans doute, aujourd'hui,
s'il n'eût pas été de bonne foi l'écho de cette conspiration
morale contre la personne de Napoléon, qui prépara si
bien la conspiration de l'étranger contre sa couronne ?
    Quelle conséquence à tirer de ces faits? C'est que si la
puissance et le génie réveillent toujours des haines, jamais
l'instrument ne peut leur manquer pour s'exprimer et se
propager ; c'est que lorsqu'elles n'ont pas la presse libre,
elles ont les conversations des salons, les correspondan-
ces et les pamphlets clandestins, moyens plus dangereux
que ceux qui pourraient être empruntés à la publicité lé-
gale. Il est incontestable que jamais la liberté des jour-
naux n'eût fait autant de mal à l'empire que les calomnies
secrète?, qabilement propagées contre l'empereur. Il y a
dés faits qu'on n'oserait pas même alléguer sous un régime
de publicité, et l'étouffement de la censure rend au con-
traire tout croyable, jusqu'aux absurdes mensonges im-
portés de Londres d'après les Goldsmith.
    Les hommes du pouvoir se piquent philosophiquement
d'une grande indifférence pour la popularité et d'un su-
perbe dédain pour les attaques des journaux. Ils ont rai-
son, s'il ne s'agit pas d'un mépris systématique de l'opinion
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