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il est descendu dans les salons dorés de la société française. ïi
s'empare des esprits, il domine ces conversations orgueilleu-
sement bienveillantes où l'on vante tour à tour la charité
catholique, la liberté protestante, la simplicité patriarchale
de l'islamisme, la majesté du paganisme indien : l'éloge alter-
natif de toutes les doctrines dispensant d'en professer aucune.
Il pénètre aussi dans les mœurs sous la forme d'un optimis-
me officieux qui justifie les forfaits politiques par des théories
ou des nécessités, pour qui les crimes ne sont que des m a l -
heurs, et qui menace d'effacer les peines dans le livre de la
loi, la notion du mal dans les consciences. Mais son action
s'exerce plus puissante encore que la littérature contempo-
raine : toute passion est a b s o u t e , pourvu qu'elle soit drama-
tique; tout amour devient sacré, fût-il même adultère : l'idée
de Dieu s'évanouit devant la mensongère apothéose de la
nature et de l'humanité. Et n'esl-ee pas lui, le panthéisme, le
vieux serpent sous une forme nouvelle, qui tascine les aigles
du génie et les attire dans l'abîme^ qui naguère encore fit
tomber l'ange, et mil des paroles de blasphème sur les lèvres
du croyant? Aussi ne nous étonnerons-nous point de r e t r o u -
ver sa trace dans un monument moderne élevé par des mains
dont plusieurs ne furent pas irréprochables : le Panthéon lit-
téraire. Là se voient confondus au milieu des mêmes hon-
 neurs Lucien avec Platon, Brantôme et Joinville, Rabelais et
 saint François de Sales, Voltaire avec Bossuet, Gibbon avec
 Lingard. Le volume de cette collection qui a été remis à notre
 critique n'est malheureusement pas à l'abri du même repro-
 che. Plusieurs compositions s'y rencontrent, échappées au
 délire impur de la muse idolâtre, et qu'une plume religieuse
ne devait pas traduire. Car la traduction, c'est la popularité,
et il y a imprudence au moins à populariser la connaissance
 des désordres qui souillaient les gymnases d'Athènes et les
 thermes de Rome. La science austère a seule le triste droit
 de sonder les mystères d'infamie , mais la science véritable
n'a pas besoin d'interprètes ; la langue d'Homère et de Dé-