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3S9 ment. Mais je suis convaincu qu'on ne déterminera jamais la société à se transformer contrairement à sa nature, c'est- à -dire, en substituant la propriété générale à la propriété privée, et l'organisation par groupes nombreux à l'organi- sation par familles. L'active émulation des talents et des travaux, les concurrences et les inégalités qui en résultent, et la transmission par héritage des fruits acquis à l'indivi- du par ces moyens, sont aussi des faits qui subsisteront toujours, et contre lesquels il n'y aura jamais que des ten- tatives isolées et de peu de durée. S'il était vrai qu'on pût persuader à la société qu'elle doit se refondre suivant les systèmes des socialistes, et que le bon sens général n'y résistât pas, je dis qu'il n'y aurait point de censure capable d'empêcher une telle idée de se répandre, de germer dans les croyances et de se résoudre en une grande révolution : il ne faut pas exagérer la puis- sance de la presse ; la force qu'elle donne à une idée n'est pas la sienne propre] c'est celle de l'idée reflétée dans les intelligences. Mais, au défaut de l'instrument, vous ne pouvez pas empêcher à l'idée elle-même d'exister, et de se répandre par d'autres canaux, comme un courant d'eau dont on intercepterait le lit se ferait jour par de nouvelles issues. Y avait-il une presse libre, un journalisme libre au seizième siècle, lors de la réforme prolestante? Y en avait- il au dix-huitième siècle, lors du travail des esprits qui a préparé la révolution française? Mais, en fait} les réformateurs socialistes n'ont point fait de progrès. L'organisation saint-simonienne s'est dissoute; le fouriérisme en est à quêter les moyens matériels de son premier phalanstère; et tout cela malgré l'éloquent et courageux apostolat d'une foule d'hommes qui se sont dé- voués, avec des talents regrettables, au service de ces chi-