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339 forte preuve que le christianisme s'adresse à l'homme entier et qu'il s'intéresse au bien-ôtre de la chair. Mais chose non moins remarquable, les premières hérésies qui furent com- battues furent celles qui ne venaient la plupart que d'un excès de sévérité et de haine envers le corps. Ainsi les Marcionites et les Manichéens soutenaient que la chair était mauvaise et l'ouvrage du mauvais principe, d'où ils concluaient qu'il n'était point permis d'en manger, ni de la multiplier par génération (1). L'église chrétienne déploya toute sa sévérité contre ces doctrines subversives, et si peu conformes à l'es- prit de l'Evangile; elle les réduisit en poudre, en déchaî- nant contre elles les voix puissantes d'Origène et de Ter- tullien. La pensée dominante de l'admirable livre de l'apologé- tique, apologeticus adversus gentes, n'est autre chose que la démonstration par les faits de l'impuissance radicale du po- lythéisme pour conduire l'espèce humaine dans une voie d'ordre, de moralité et de vigueur, tandis que la religion chrétienne possède en elle toutes les conditions pour réaliser ici-bas le bonheur possible. Tertullien, dans ce terrible ré- quisitoire contre les institutions du passé, met à nu, sans ménagement, tous les vices issus nécessairement de la reli- gion païenne, et qui doivent compromettre l'intérêt de l'es- pèce . « Vous marchandez les adultères dans les temples, s'écrie- t-il en s'adressant aux païens; vous corrompez la pudicité des femmes devant les autels Les philosophes ont cou- tume de souiller les mariages de leurs amis; ils prostituent aussi leurs mariages avec beaucoup de patience à l'impudi- cité de leurs amis; ce qu'ils ont appris [credo) je crois en l'école d'un Socrate grec, et d'un Caton romain, qui on£ (.1) Fleury, Mœurs des Chrétiens, p . 38-1688,