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163 nature simple et naïve, c'est bonhomie pure. Il chante, c'est son plaisir, non la mission qu'il se donne, non le but qu'il se propose : il chante et la poésie coule à flots de ses lèvres. » Souvent le nom de Lafontaine revient sous la plume de Topffer, et toujours il semble se le proposer pour mo- dèle. C'est qu'en effet il existe plus d'un rapport entre ces deux écrivains : même simplicité d'images et de style, même candeur d'expressions, même modestie. Topffer vit retiré dans une petite campagne, près de Genève, où il consacre sa vie à former l'esprit et le cœur de trente jeunes élèves ; tout dans ses habitudes, dans son maintien, dans son langage, dans son costume, rappelle l'homme primitif, patriarchal, qui fuit les bruits du monde, qui veut couler ses jours dans un cercle étroit d'intimité, qui aime à s'en- tretenir avec soi-même ; s'il écrit, c'est pour lui, pour ses disciples, ou pour quelques amis seulement, et chacune de de ses pages réfléchit quelque chose de sa personnalité bonne et aimante. La gloire, qu'il ne cherchait pas, est allé prendre ses œuvres, mais elle n'a pu le décider à quitter sa paisible retraite. Au milieu du monde, il appor- terait, à la vérité, son style, mais il ne s'appartiendrait plus autant. Le choc des faits extérieurs, en détournant son esprit du spectacle de lui-même, lui ravirait cette poésie du souvenir qui fait son originalité, sa grandeur. Voulez-vous connaître le secret de sa force ? le voici : a Charme bien grand ! pouvoir légitimement dormir, ne rien faire, rêver et cela, à cet âge de l'enfance où notre propre compagnie est si douce, notre cœur si riche en entretiens charmants, notre esprit si peu difficile en jouissances ; où l'air, le ciel, la campagne, les murs ont tous quelque chose qui parle, qui émeut 5 où un acacia est