page suivante »
118 ment des fortifications qui servira éternellement de guide à ceux qui professeront dorénavant cette science (1). On serait tenté de croire que, pour être arrivé si jeune aux sommets des hautes sciences, mon frère dut négliger toute autre espèce de connaissances. On se tromperait. Il n'a jamais cessé de cultiver la littérature, la pliilosopliie et les arts, et il s'y connaissait. Il avait fait le plan d'un ouvrage sur l'Entendement hu~ main dont il a laissé un grand nombre de fragments; et, pour l'exécuter dignement, il avait commencé par analyser Locke et Condillac. Ces travaux l'avaient conduit, comme toutes les per- sonnes qui se sont livrées à des études de ce genre, à des recherches fort étendues sur les langues ; et il avait jeté les fondements d'une grammaire philosophique dont tous les principes me parurent au suprême degré ingénieux et profonds. J'ai de lui un Essai sur la théorie de l'harmonie et un autre Essai sur les gouvernements libres et le degré d'obéissance qu'ils peuvent obtenir des peuples, ouvrage dans lequel il examine la constitution administrative qu'il regarde comme plus importante pour le bonheur des nation que la constitution politique. Ces occupations d'un cerveau éminemment penseur ne l'empêchaient point de donner quelques instants à des es- sais de morale et de littérature légère. Son esprit était un instrument excellent, qu'il maniait avec habileté et qu'il pouvait appliquer à tout. Il lisait avec délices les bons poètes, et il sondait les mystères du style de Racine et de Lafontaine, avec la mê- me facilité qu'il résolvait une question algébrique. Il a inséré dans la Décade une allégorie pleine de grâce dans le genre des Troglodytes de Montesquieu, et dont le but était de faire sentir la fâcheuse influence des préjugés sur le sort de l'espèce humaine. Mais ce qu'il a fait de plus considérable pour ce jour- nal, ce sont les chapitres de la Politique intérieure, depuis (1) Le défilement est celle partie de Tari des forlificalions qui, quelque soient les accidents de terrain, dispose les ouvrages de manière à garantir ceux qui les défendent de l'atteinte directe des balles et des boulets de ceux qui les attaquent.