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CONSTANCE DAÃMER. 23b seuls ensemble. Il se nomme Isidore Lollier ; un beau nom, n'est-ce pas ? L'homme est plus joli encore ; une longue figure blanche comme le lait, où brillent de beaux grands yeux bleus ; des cheveux d'un blond cendré qui se lient avec de grands favo- ris d'Anglais ; des mains effilées, terminées par des ongles de deux centimètres, tranparents comme du verre. C'est l'idéal du sexe. Il se présente très-bien, toujours mis en noir, avec un chapeau de soie et des souliers vernis. Quoiqu'il ait de la fortune, il n'est pas encore à son compte. Il fait le premier garçon d'une grande maison d'ornement capillaire, de toilette et nouveautés, située dans le premier quartier de Lyon. Tout le monde élégant de la ville se fait coiffer et ganter là ; on respire en entrant le parfum d'une église; mais c'est beaucoup plus beau. Isidore fait la for- tune de la maison, parla façon dont il reçoit les clients, avec une grâce charmante et une conversation pleine de sa merveilleuse instruction. Là où il ira, il emportera toute la clientèle. Le pa- tron l'a si bien compris qu'il a voulu lui céder son fonds, avec sa fille ; mais, quoiqu'elle soit jolie et bien élevée, Isidore l'a refu- sée, parce qu'il m'aimait, dit-il. Cela est bien vrai, car MUo Pel- lerin vient de se marier, il n'y a pas huit jours, avec un autre qui prend le magasin. Cela nous mettra plus à l'aise pour créer un établissement ri- val, sans faire concurrence au patron de mon mari. Il aurait pu faire tout de suite quelque chose de magnifique ; car il a de grandes propriétés dans son pays ; mais il ne veut ni les vendre ni les hypothéquer. Vous admirerez là son esprit de conduite et serez heureuse par avance du bon choix qu'a su faire votre Constance. Quand nous serons bien installés et que nous pourrons quit- ter la maison, pendant une saison morte, je me promets bien d'aller vous présenter mon mari. En attendant, croyez, chère dame, que, dans le beau jour de mon mariage, j'aurai le cÅ“ur plein du souvenir de vos bontés. CONSTANCE.