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' - CONSTANCE DAYMER. 227
LETTRE XIX.
Lettre du curé d'Abbans à Mathieu Servolet.
D'Abbans, le l or février.
Mon cher Mathieu,
Suivant vos indications, je réponds au billet que vous avez
laissé à la cure, par une lettre qui doit arriver à Chalon en même
temps que vous et votre convoi de grains ; car j'«spère que,
rendu à la Saône, les glaces ne vous auront plus entravé.
Je regrette vivement de n'avoir pas reçu votre visite ici..
11 y a des questions auxquelles on n'aime pas à répondre par
écrit. Je ne veux pourtant pas trahir la confiance que vous avez
mise en moi ni vous refuser mes conseils dans l'épreuve de votre
vie où vous paraissez en avoir le plus besoin. Les suivrez-vous ?
Je vous connais trop pour en douter. Celui qui veut faire une
folie ne demande pas de conseils ; et la droiture, la sagesse
dont vous avez donné tant de témoignages, me sont un sûr ga-
rant que vos réflexions, déjà gravement faites avant de tenter
nulle démarche auprès de Constance Daymer, vous en détour-
neront encore davantage, vquand cette lettre viendra, comme
appoint, peser dans la balance de vos déterminations.
Vous vous proposiez, en allant à Mà con et à Villefranche, Ã
vos affaires, de pousser jusqu'à Lyon, pour parler à Constance,
faire fléchir sa résolution à votre égard et la ramener ici.
Je vous poserai ce que nous appelons un dilemme. Constance a
annoncé, au jour de l'an à votre mère, l'intention de se mettre
à son compte dans je ne sais quelle industrie. Cette détermiaa-
tion, si elle l'a exécutée, me semble un indice à peu près sûr
que cette jeune personne est de celles auxquelles il ne convient
pas de songer. Je ne veux pas faire de jugement téméraire; mais
on ne peut résister à la déduction et à l'induetion des faits, ni
se priver de leur enseignement pour régler sa conduite, surtout
celle des autres quand on en est chargé. Cette personne m'a
toujours paru vaine et légère, comme à tout le monde ici. J'ai