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210 ° CONSTANCE DAYMER. moi qui n'ai rien. Je dois trop déjà à cette famille. L'enfant de la Charité doit se rappeler qui il est et pas prendre tout de la main d'autrui, sous peine de s'humilier, de s'avilir. Pouvais-je entrer en ménage de la sorte? Ma fierté se révoltait là contrfl. Enfin, ai-je dit, mon plus grand chagrin est de quitter Ursule, qui a toujours été pour moi une bonne sœur, qui a fait mon ou- vrage, cache mes fautes et le mieux répondu à mes inspirations; mais c'est elle-même qui me quitte. Dans peu de jours, sans doute, elle sera dans un couvent de Besançon. Le lendemain, nouvel assaut, mais qui n'a eu près de moi qu'un succès de rire. C'est M. Penaud, qui me priait de ne pas „ déserter le village, disant qu'il me parlait comme maire. Cepen- dant il n'avait pas pris son écharpe, comme s'il avait été prêt à me marier avec Pierre-Antoine Poulaillot, le maître d'école et secrétaire de la mairie. Une telle démarche n'était bonne qu'à me convaincre que le secrétaire mène M. Penaud par le bout du nez. Il en sera pour ses frais. Le même jour, le curé est venu me voir, et cela, c'est une autre note. Je ne te rapporterai pas ce qu'il m'a dit, parce que c'est bien long et j'en suis encore confo: due. Il m'a boule- versée, retournée. Il a fallu promettre de faire une retraite, d'interroger Dieu sur ma vocation, durant les fêtes de Pâques. Que sais-je? Il m'a fait pleurer, comme quelquefois dans ses sermons, d'autant mieux que celui-là , prêché pour moi seule, s'appliquait à merveille à ma situation. Ce n'est que dans deux jours que je dois faire connaître ma résolution de partir; mais, dès à présent, je te l'annonce ; parce qu'elle est bien arrêtée, et, certes, si j'y avais été moins ancrée, s'il ne s'était pas agi de mon avenir, d'une épreuve d'où dépend le sort de ma vie entière, je n'aurais pu résister aux représentations éloquentes dont j'ai été l'objet. Fais donc vite connaître ma réponse à Mme Malleva]. Je par- tirai d'ici à l'époque qu'elle voudra. Il est inutile qu'elle m'en- voie de l'argent pour le voyage. J'en ai. Insiste seulement sur le gage. Puisqu'on apprécie ma figure, ma lecture, mon arrière-point, même ma conversation, il faut que tout cela se