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50 DU SURNATUREL. ce n'est pas ainsi qu'on invente, et les faits de Socrate, dont personne ne doute, sont moins attestés que ceux de Jésus- Christ (i). » En effet, voilà tout à l'heure dix-neuf siècles que l'authenticité et la véracité de l'Évangile sont en butte, sans en être ébranlées, aux attaques les plus savantes et les plus phi- losophiques. Aucun autre livre historique n'a été soumis à une si rude épreuve. Si donc les récits de l'Évangile ne sont que des fables, qu'on ne nous parle plus d'Alexandre, de César, d'Attila, ete., il n'y a plus rien de certain dans l'histoire. C'est le pyr- rhonisme universel qu'il faut mettre à la place. Mais, si l'on ne peut contester la véracité des récits évangéliques, il est clair que le fait surnaturel repose sur une base immuable. Dès l'instant qu'il est prouvé, par la raison, que Dieu peut déroger à ses pro- pres lois; qu'il est établi par la croyance constante du genre humain qu'il y déroge ; qu'il est constaté par des faits positifs qu'une dérogation a eu lieu,' il n'y a plus qu'à dégager par la critique le vrai du faux. La sagesse ne consiste donc pas à afficher le scepticisme à tous coups, mais bien à appliquer avec sincérité les règles du discernement. De même qu'il ne faut pas se fier à tous les es- prits, de même, il ne faut pas ajouter foi à tous les prodiges. A côté du miracle, il y a le prestige ou l'illusion, c'est-à -dire, qu'à côté de l'œuvre de DÎPU, il y a l'erreur se déguisant sous une apparence trompeuse de vérité. Or, la mission de la criti- que est d'empêcher que le mensonge ne prévale et ne soit pris pour la réalité. , Toutefois, de ce qu'un miracle n'est pas et ne peut être phi- losophiquement prouvé, il ne s'en suit nullement qu'il soit faux. On est seulement en droit de conclure que toutes les opérations de la droite de Dieu ne sont pas destinées à réaliser des vues générales de sa Providence. Parmi ces opérations, qui appar- tiennent certainement à l'ordre miraculeux, il en est beaucoup qui ne sont que de simples faveurs surnaturelles accomplies dans le but de répondre à des vues particulières de bonté ou de (1) Profession de foi du vicaire savoyard dans VEmile.