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 178              LES CHASSEURS DE RENNES.

     Je suivis ce conseil, bien persuadé qu'en fait de ruses
  de guerre ils en savaient plus long que moi, et nous al-
  lâmes tous nous blottir derrière des broussailles et de
  hautes herbes, qui nous masquaient en nous permettant
  de surveiller les abords de la rivière.
     Je ne tardai pas à distinguer ce bruit confus qui indi-
  que rapproche d'une foule considérable. Bientôt en effet
  des silhouettes humaines se profilèrent sur l'horizon, et
  en quelques minutes la plage fut couverte d'hommes que
 j'apercevais à peine dans la brume du matin. Ils me pa-
 raissaient en général plus grands et plus forts que les
 gens de Solutré. Tous étaient armés de lances qui se dé-
 coupaient en lignes noires sur les bandes lumineuses du
 ciel, et ils poussaient devant eux des boeufs domestiques,
 des moutons, des chèvres et des chevaux chargés de lourds
 fardeaux, probablement de vivres et d'objets de campe-
 ment. Des chiens, les premiers que je visse depuis mon ar-
 rivée au milieu de ce monde barbare, aboyaient autour
 des troupeaux. J'estimai que le nombre des guerriers
 pouvait s'élever à mille ou à peu près. Ils passèrent
heureusement sans remarquer nos traces.
    — Qu'est-ce que cela? demandai-je à mes hommes
quand la queue de la colonne eût disparu derrière un dé-
tour du rivage.
    — Les Cheveux-Pâles ! me répondit-on.
    J'appris que les Cheveux-Pâles , ainsi nommés parce
qu'ils étaient généralement blonds, habitaient depuis
quelques mois, les montagnes qui sont à l'orient de la
Bresse ; qu'on les voyait parfois sur la rive gauche de la
Saône et qu'ils passaient de temps en temps la rivière
pour venir échanger avec les chasseurs de rennes des
produits de leurs montagnes, et particulièrement du cris-
tal de roche des Alpes, très-recherché comme objet de