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LES CHASSEURS DE RENNES. 131 accompagnaient, et battaient le bois autour de nous pour écarter les bêtes. Nous arrivâmes, au bout d'une heure de marche, dans un endroit découvert, sur les bords de la Grosne, où des arbres brisés et des herbes foulées attestaient le passage fréquent des éléphants. Tout à coup, j'aperçus à peu de distance quelque chose comme un énorme serpent qui s'agitait au dessus du gazon. —• Qu'est-ce que cela, m'écriai-je en saisissant mon fusil? —'Tu vas le voir, répondit I-ka-eh ; c'est le mammouth. En effet, ce que je prenais pour un serpent colossal, n'é- tait autre chose que la trompe du mammouth, qui, tombé dans le fond d'une fosse étroite, et serré entre les deux parois, s'épuisait en efforts inutiles, sans pouvoir se re- dresser sur ses jambes. Le monstre était depuis la nuit précédente dans cette fâcheuse situation. J'admirai avec quelle industrie et quelle adresse, les malheureux chasseurs de renne venaient à bout de cap- turer un aussi redoutable adversaire. Un ravin naturel dont ils avaient fermé les deux extrémités à l'aide de quartiers de roches entassés formait une vaste cavité, qu'on avait recouverte de branches d'arbres entrelacées et de gazon. Un éléphant s'étant imprudemment avancé sur ce pont, trop léger pour son poids, avait déterminé l'effondrement du fragile ouvrage, et se trouvait pris, à moitié enfoui sous les débris. On chercha d'abord à l'assommer avec des blocs de pierre; mais la bête était énorme, et son crâne blindé ré- sistait à tous les chocs. Alors, nos compagnons de chasse ramassèrent une provision d'herbes sèches, les jetèrent dans le trou béant et y mirent le feu.