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128 LES CHASSEURS DE RENNES. Jument dépourvue des termes scientifiques les plus indis- pensables. Elle voulut savoir ce que nous disions. Je le lui expli- quai tant bien que mal. — Le vieux sorcier, ton ami, est bien savant, me dit- elle ; mais il ignore ce que racontent nos vieillards ; cela pourrait cependant l'intéresser. — Et que disent-ils, vos vieillards ? — Ils disent qu'il fut un temps bien éloigné où les hom- mes vivaient à peu près comme les bêtes ; ils ne savaient ni fabriquer un arc, ni élever une hutte. Les grottes leur servaient d'abris naturels, et quelques pierres grossière- ment taillées, emmanchées dans des massues de bois étaient les seules armes qu'ils connussent pour se défen- dre contre l'attaque des ours, des tigres et des loups. Mais un jour, il survint de grandes pluies. Toutes les plaines qui sont au-delà de la rivière furent inondées et formè- rent un grand lac dont les eaux montèrent jusqu'au ni- veau des plus hautes montagnes et noyèrent à la fois les hommes et les animaux. Puis, les eaux se retirèrent et les solitudes ne furent repeuplées que longtemps après. — Mais c'est l'histoire du déluge qu'elle nous ra- conte là ! Le docteur était ravi. — Il y a longtemps que je savais tout cela, me dit-il; mais je suis heureux d'en trouver la confirmation dans un récit naïf et qui ne me paraît nullement suspect. Ces hommes primitifs dont I-ka-eh vient de nous parler, nous retrouvons à chaque pas leurs débris, leurs armes gros- sières, leurs demeures souterraines. Et sans aller plus loin, le Maçonnais m'en a fourni de nombreuses traces. C'est ce que les archéologues appellent l'âge du grand ours ou l'âge des hachettes, à cause du type constant des armes