Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
54                  ÉTUDE SUR LE PATOIS LYONNAIS.

mère pourrait dire que je suis trop gauche encore pour me
marier.

      Anen! d'aut! que la man s'estire,
       Que piéi ma maire pourrie dire
  Qu'ai panca proun de biais, o, périme marida.
      Vai, vai, dis, tu que te vantaves,
      Moun paure ami ! se te langaves
  Per la cueie à quintau, la fuéio, crese, que
      Quand fuguesse touto en pivello,
      Pourries manja de regardello (1) .'

         Me crésès donne uno ganchello !
     Bespoundeguè lou drôle, un brigounloun                  mouquet.

   Vous me croyez donc une mazette? repartit le gars légè-
rement penaud ; eh bien ! à qui cueillera plus vite, Made-
moiselle, nous allons le voir ! . . . » Et, des deux mains,
passionnés, ardents au travail, de tordre et de traire
brindilles et ramée. Plus de paroles, plus de cesse! -
Brebis qui bêle perd sa dentée. Le mûrier qui les porte est
cueilli en un instant.
   Ils firent, pourtant, bientôt halte. — Quand on est jeune
tous deux, la belle chose ! Comme dans le même sac, ils
mettaient la feuille ensemble, les jolis doigts effilés de la
fillette, se rencontrèrent emmêlés avec les doigts brûlants
de Vincent. Elle et lui tressaillirent ; leurs joues se colo-
rèrent de la fleur d'amour, et, tous deux à la fois, d'un feu
inconnu sentirent l'échappée ardente. Mais comme Mi-
reille, avec effroi, sortait sa main de la feuillée, lui, par le
même trouble tout ému :

   (1) Va, va! toi qui te vantais, mon pauvre ami, si tu te mettais à gages,
pour cueillir à quintal la feuille, je crois que, fût-elle toute eu brindilles,
tu pourrais manger des regardeiles (chose que l'on regarde et qu'on n'ose
pas toucher).