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CHRONIQUE THÉÂTRALE. 311 Ernest. Elle visait plus haut que son héritière ; elle cherchait des effets d'un ordre supérieur; mais, tout en rendant à son talent incontestable la justice qui lui est due, il faut bien reconnaître qu'il n'était exempt, à la longue, ni de monotonie, ni d'une certaine affectation. Sa grâce n'était pas sans raideur ; elle possédait, outre une distinction réelle, mélangée de quelques minauderies, cet art qui a tant de puissance sur le public, l'art des vibrations nerveuses ; et, de même que l'on dit qu'on s'écoute parler, on peut dire qu'elle se voyait jouer. M m e Paul-Ernest brille par des qualités opposées, c'est un talent exempt de tout charlatanisme ; la simplicité de sa méthode, pour parler la langue musicale, est des plus remarquables. Elle fuit les ambitieux points d'orgue, loin de courir après l'ut de poitrine et d'exagérer les effets, elle les évite, elle les atténue. Il y a toujours un accord parfait entre ses moyens et le but qu'elle se propose. De la franchise, de la bonhommîe , quelque chose d'épanoui et de spirituel à la fois , une égalité d'humeur charmante , point de moue, une figure où le sourire naît de lui-même , de l'aisance et de l'honnêteté dans le jeu, et, avec tout cela, assez de puissance pour porter noblement un grand rôle, comme elle l'a prouvé dans la Dame aux Camélias, telle est M me Paul-Ernest. Nous sommes sûr qu'une fois partie de Lyon elle sera encore plus regrettée qu'elle n'a été applaudie, quoique les applaudissements et les fleurs ne lui aient, certes, pas manqué. Aussi, pour adoucir les regrets de ce départ, M. Detestang n'a songé à rien moins qu'à nous donner MUe Rose-Chéri.