Pour une meilleure navigation sur le site, activez javascript.
page suivante »
228                       CHATEAUBRIAND,
 aucune part aux triomphes que remportaient les armées de la
  République ; il répugnait au cœur du fier gentilhomme de com-
 battre sous un drapeau qui n'avait pas été l'étendard de la cheva-
 lerie, et il voulait relever celui qui avait conduit Turenne et Condé
 à la victoire. Blessé au siège de Thionville, et atteint aussitôt
 après d'une maladie qui le mit sur les bords du tombeau, il
 borna là sa carrière militaire. La guerre n'était pas son théâtre, il
 était réservé pour d'autres destinées.
    Voyageur, Chateaubriand eut un instant le projet de marcher
 sur les traces de Cook, et de se rendre illustre eh cherchant par
 terre, dans le nord, le passage tant rêvé de l'Océan Atlantique à
 la mer Pacifique. Il espérait être plus heureux que les voyageurs
qui l'avaient précédé. La révolution fit avorter ce dessein, et son
 auteur dut se borner à explorer cette neuve et grandiose nature
 de l'Amérique septentrionale, dont les immenses et sauvages as-
 pects impressionèrent si heureusement sa jeune et ardente ima-
 gination. Plus tard, il dirigea ses pas vers l'Orient, visita les
ruines poétiques de la Grèce, évoqua de sa voix les ombres de
 ses grands hommes, salua la capitale de Constantin, franchit la
Propontide, l'Archipel, ses îles, séjour des fables ; parcourut la
terre chantée par les prophètes, arrosée par les sueurs et le sang
deTHomme-Dieu, foulée par les immortels guerriers de Godefroi,
s'assit sur le Golgotha et but aux eaux du Jourdain ; puis tour-
nant par l'Egypte, il suivit la marche des Arabes, conquérants de
l'Afrique, recherchant partout, sous les ruines qu'ils avaient
semées, les vestiges de l'antique civilisation, et revint par
l'Espagne.
    Chateaubriand a consigné les souvenirs et les impressions de
ces voyages dans deux ouvrages, les Natchez, auquel il faut
joindre Atala qui n'est qu'une épisode, livre quelque peu roma-
 nesque, dont on peut blâmer l'idée, la place, mais où les mœurs
 sauvages, les grandeurs de la nature américaine sont peintes
 avec une saisissante vérité, une originalité de style sans précé-
dent, et dans VItinéraire de Paris à Jérusalem, œuvre de foi,
 de génie, d'érudition et de goût.
    On a reproché à Chateaubriand d'avoir déployé moins de ta-