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302 LA TENTATION. Humble renoncement fertile en pures joies, Nul n'arive au repos qu'en marchant sur tes voies ; Par toi seul le désir, conservant tout son feu, Vole à travers ce monde et va droit jusqu'à Dieu. Ta main seule du cœur tend la plus noble fibre, Qui refuse ton joug ne veut pas être libre, Et nul n'aime son frère en toute charité S'il ne te chérit pas, divine pauvreté ! Heureux qui te choisit pour maîtresse et pour guide, Tu réserves son cœur au seul trésor solide. Le riche en ses ennuis languissamment couché N'est qu'un pâle captif à son or attaché. Mais l'âme, de tes fils plus ardente et plus tendre, Sur les ailes de tout est prompte à se répandre ; Elle s'en va flotter sur les soleils levants, Sous les chênes sacrés fait ses palais vivants, Et s'enivrant d'air pur et de fleurs sans culture, A pour luxe éternel l'amour de la nature. Dieu te donne aux chanteurs pour ange gardien, Tu tailles dans le houx leur rustique soutien, Sous ta cape de laine ils vont de ville en ville, Par toi leur lyre est d'or si leur coupe est d'argile. Bienheureux entre tous ces aveugles divins Qui mangent ton pain noir sur le bord des ravins ! Le monde après mille ans, et sans que rien l'en sèvre, S'abreuve encore du miel échappé de leur lèvre. Qui ne voudrait t'aimer et te suivre à ce prix ! Ne f éloigne donc plus ; à ceux que tu chéris N'épargne pas la faim, les maux de toute sorte, Ange ! mais au désert où l'esprit les emporte,