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   — Quel dommage qu'il n'est pas reçu un sursis. Le roi lui
aurait fait grâce de la vie. C'était assez , s'il est coupable^de
l'envoyer aux galères.
   — Le voilà arrivé! Il parle; on dirait qu'il récite la prière
des agonisants.
   — Jésus, Marie! Comme il est pâle! Il a peur de la mort.
   — C'est qu'il a du repentir.
   — C'est qu'il pense à sa mère.
   — Pauvre mère ! ! !
   Un incident inattendu vint interrompre le cours de ces ex-
clamations. Le moment suprême était arrivé. Déjà le bourreau
appliquait l'échelle contre la fatale potence lorsque, par un
heureux hasard, cette échelle se trouvant trop courte , le bour-
reau fut obligé d'en aller chercher une autre. Les archers, qui
devisaient à quelque distance, se contentèrent de rire et ne
s'approchèrent pas du condamné qu'ils laissèrent en quelque
sorte à la merci des spectateurs. Celui-ci éleva tristement
ses yeux vers le gibet, instrument de sa mort, et les reporta
ensuite sur ceux qui l'entouraient, comme s'il eût voulu leur
dire: « Mon sort est entre vos mains! » Une larme tomba de
ses yeux en ce moment ; puis il secoua ses bras avec violence:
efforts inutiles! il ne put rompre les cordes qui les tenaient
 fortement liés. Tout d'un coup il sent dans ses doigts un
couteau qu'on vient d'y glisser. Par un mouvement plus rapide
que l'éclair les cordes sont coupées , on couvre ses épaules
d'un manteau, e t , la foule s'ouvrant instinctivement devant
lui, il s'élance , il est libre.
   Il y eut un moment de profond silence , puis un cri involon-
taire de surprise et d'admiration se fit entendre. Les archers
se retournèrent et le premier objet qui frappa leurs regards
 fut le condamné qui fuyait.
— Arrêtez ! arrêtez ! crièrent-ils à la fois.
   La foule resta immobile et silencieuse.
   — Arrêtez! au nom de Monseigneur l'Archevêque, arrê-
tez le fuyard !