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304 Cependant les chances de la guerre contre l'islamisme se compliquaient d'une triste manière ; l'état des choses chan- geait du côté d'Orient. Aussi le contrecoup se fait bien vite sentir en E u r o p e , et les Juifs sont naturellement l'holocauste offerte au Seigneur. Ne les accusait-on pas d'empoisonner les fontaines? ne crucifiaient-ils pas de jeunes enfants ? n'insul- taient-ils pas aux hosties saintes ? et tous ces crimes commis à la face du peuple chrétien n'attiraienl-ils point la malédic- tion divine sur l'Orient et l'Occident? Je ne reviendrai pas sur la critique de ces faits dictés presque toujours par la calomnie. Leur influence fut g r a n d e , elle ébranla les siècles suivants, et si plus tard la France cessa de s'abreuver du sang juif, ce fut par ce motif bien simple qu'elle l'avait épuisé. Vers l'année 1182 , Philippe-Auguste, à peine assis sur le trône , continua l'œuvre de Louis-le-Jenne ; les Juifs le fati- guant , il invoqua l'agiotage et l'usure, proféra le nom de b l a s p h è m e , et chassa les Israélites, ainsi que les comédiens et les farceurs. Au fond du décret de cet e x i l , je retrouve encore la pensée de la royauté , la religion est le motif , la cupidité est la vraie cause. Philippe dépouille les Juifs avant de les expulser, les quatre cinquièmes des sommes dues sont remis aux débiteurs des Israélites , et le trésor royal prend le reste pour lui. Au moyen de cet accommodement, les sujets n'eurent qu'à s'applaudir de la spoliatrice générosité du monarque ; mais le peuple fanatisé n'oublia pas sa part de sang ; les enfants de Juda qui purent échapper au massacre emportèrent dans l'exil et leur misère et leur ressentiment. Vraiment j'ai peine à répéter toujours la même chose, mais l'historien a sa tâche , et je la remplirai. Si les chrétiens d'a- lors ont souillé leur m é m o i r e , les chrétiens d'aujourd'hui n'assumeraient-ils pas sur eux la responsabilité de ces actes, en craignant de les accuser? Jérusalem cède aux efforts de Saladin, les chrétiens p e r - dent la Terre-Sainte. C'est en vain que les princes d'Europe se coalisent pour venger l'honneur de la croix; Philippe-