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des Israélites dans le domaine de l'Eglise. Aussi son écrit
est-il, tout à la fois, l'expression ardente du zèle le plus cha-
leureux et du fanatisme le plus violent ! Je ne sais si le ca-
ractère d'Agobard s'était aigri à la longue , mais jamais jus-
qu'ici nous ne l'avons trouvé plus intraitable, plus pressant,
plus e m p o r t é , j'allais presque dire plus insolent contre les
Juifs. Ce n'était pas assez de prononcer anathème sur les Is-
raélites et leurs descendants, il lui fallait encore faire des-
cendre la malédiction de Dieu sur leurs r e p a s , leurs caves,
leurs celliers et leurs animaux. En voulant trop étendre la
colère divine, on la relâchait, on la dégradait m ê m e . Du
r e s t e , ces paroles recevaient un formel démenti par l'accrois-
sement de la richesse des Juifs et la faveur dont elle parais-
sait être l'objet exclusif. En vérité, ces frénétiques transports
d'une fièvre religieuse m'étonnent lorsqu'ils sont placés dans
la personne du savant et grave archevêque de Lyon. Celle
intolérance accidentelle n'était pas dans sa nature toute phi-
losophique. J'explique ma pensée par ce fait.
   En vertu de la position topographique de L y o n , le vent
d'est venait d'amener la grêle et des pluies abondantes sur
notre ville et les campagnes qui l'avoisinent. Si les Juifs
avaient été moins privilégiés dans ces t e m p s , ils auraient
supporté vis-à-vis le peuple la responsabilité de ces ouragans,
mais on tourna l'accusation contre des étrangers nouvelle-
ment sortis du fond de la Germanie ou des forêts de la
Bohème. Ceux-ci furent nommés sorciers ou tempestaires, fai-
seurs de tempêtes. Ces tyrans de l'air, disait-on, savaient
bien mettre à profit les malheurs publics : suivant leurs sta-
tuts diaboliques, tous les fruits que la grêle avait abattus
leur appartenaient de plein droit; ils les faisaient passer dans
une région aérienne , et les vendaient à leurs compatriotes
ou à leurs parents en sorcellerie ; ils se servaient de vaisseaux
plus légers que l'atmosphère et de pilotes de la même es-
pèce pour transporter ces denrées.
  Le bruit se répandit bientôt dans Lyon que les Bohémiens