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plirait admirablement une immense étendue ; là son imagi-
nation se promènerait à l'aise, et avec la puissance de sa
v e r v e , nul doute qu'il n'enfantât une belle chose. A l'œuvre
donc ! surtout faites selon votre intelligence ; que ce soit l'en-
fant de votre cœur! Travaillez-y avec amour, sans compter
les jours et les nuits.
• Voici un artiste de conscience et de travail ; Duclaux r é -
 fléchit, observé, é t u d i e , sans se lasser jamais. Comme ces
 amants dont l'affection ne vieillit p a s , son culte pour l'art a
 conservé la sincérité et le dévouement de la jeunesse. Peu
 d'hommes apportent autant de ferveur, de modestie, de dé-
 sintéressement dans l'exercice de leur talent. Pareil aux pein-
 tres de l'école flamande , il poursuit la vérité par une étude
 minutieuse et patiente. Enfermé qu'il est dans un genre spécial,
 peut-être est-il doué d'idées trop générales, d'un esprit trop fin,
 pour atteindre le but aussi parfaitement que des intelligences
 limitées au sentiment et à l'instinct de leur organisation na-
 turelle. Bien souvent l'instinct est plus sûr que le raisonne-
 ment ; et j'ai peur que chez Duclaux celui-ci ne domine au
 détriment de l'autre. En se préoccupant trop essentiellement
 des portions de v i e , on oublie un peu la vie générale. Du-
claux dessine ses animaux avec une vigueur admirable; il
s'inquiète avec tant de scrupule du plus imperceptible détail,
que sa manière perd cette allure franche et large d'une chose
exécutée facilement. Cet artiste ressemble à la dévole espa-
gnole de Clara Gazul, qui disait à son confesseur : Une mou-
che, est-ce maigre ? Quand il fait une vache , il voudrait comp-
ter le nombre des poils de sa r o b e , et n'en pas mettre un
de plus. Je crois qu'il faut attribuer à cet excès de scrupule
l'espèce de sécheresse de sa peinture.
    Ce défaut se fait plus vivement sentir encore dans ses pay-
sages. A force de compulser, d'analyser l'effet de l'horison.,
la réfraction du c i e l , les reflets de la l u m i è r e , il finit par
voir, non pas ce qui e s t , mais la conséquence de son rai-
sonnement. Son œil s'habitue à regarder à travers la loupe